Ice Cream Memories - Saya

Quelqu’un poussa un long et tonitruant « YATTAAAAA » avant de s’élancer à toutes vitesse sur la piste de danse, bousculant tous ceux qui se trouvaient sur son passage. Daiki l’évita de justesse et le regarda s’écraser contre un groupe de danseur en riant. Des amis pliés de rire, vinrent le ramasser en titubant gaiement alors que les danseurs le repoussaient en râlant. Des cris et des éclats de rire retentirent plus loin, malgré la forte musique. C’était une sacrée soirée ! L’ambiance était complètement folle. Il ignorait qui était l’organisateur mais il avait l’impression que tout Tokyo s’y était donné rendez-vous.

Daiki joua des coudes pour se frayé un chemin à travers la foule de danseur. La proximité de ne le dérangeait pas plus que ça pour l’instant. Ce qui l’ennuyait, s’était de ne pas retrouver le groupe de potes avec qui il était venu. Il s’était absenter un instant seulement pourtant, le temps de rassurer sa chère demi-sœur qui avait tenter de le joindre à plusieurs reprises par téléphone. Elle était pire que sa mère. S’il oubliait de lui mettre un sms le matin, elle était capable de débarquer à l’appart’ ou à l’entrainement pour vérifier s’il était encore en vie. Il s’était étrangler dans son verre lorsqu’elle lui avait conseiller sur un ton innocent de ne pas oublier de mettre de capote s’il rencontrait quelqu’un. Gah. Il l’adorait mais elle pouvait se montrer très agaçante lorsqu’elle s’y mettait et il détestait quand elle se permettait de lui faire se genre de réflexion.

Une jeune fille se pendit à son cou et tenta de l’entraîner sur la piste qu’il essayait vainement de quitter. Il la repoussa avec délicatesse. Elle était déjà apparemment bien éméchée mais elle n’insista pas et se contenta de faire une moue boudeuse avant de reprendre ses déhanchés et de se trouver une nouvelle proie.

Il arriva enfin dans un endroit un peu plus calme ou de vieux canapé croulait sous le poids de quinzaines de jeunes visiblement bien imbibés. Aucun d’entre eux n’était son groupe de potes. Ce n’était donc pas là qu’il les avait laissés ? Le vieil entrepôt où avait lieu la fête était immense. Ils devaient être à l’étage. Daiki plissa les yeux intrigué en remarquant un jeune qui restait un peu à l’écart, le regard perdu. Il avait l’air de chercher désespérément quelqu’un du regard. Daiki haussa un sourcil perplexe. Il l’avait déjà croisé plusieurs fois en début de soirée. Le pauvre avait l’air de plus en plus mal à l’aise au fur et à mesure que cette dernière avançait. C’était plutôt dommage de ne pas profiter d’une fête pareille !
Daiki eut un sourire en coin et s’approcha de lui avec assurance, l’esprit emplie de mauvaise intention.

« Yo ! » fit il en parlant fort pour se faire entendre par-dessus la musique et en passant son bras autour des épaules du timide. « On m’a dit que c’est toi qui revendait la meilleure came de Tokyo. C’est quoi tes prix ? » Poursuivit il avec sérieux. Il haussa légèrement un sourcil et planta un regard innocent dans les yeux de celui qu’il avait décidé d’embêter. Mais ça ne dura pas longtemps et il explosa de rire face à la tête que lui adressa le jeune en retour. C’était trop tordant ! C’était le genre de conneries qui ne rataient jamais et qui avaient le don de le faire rire.

un coup d'œil à gauche, puis à droite. rien, évidemment. il ne comprenait même pas ce qu'il faisait ici, au milieu d'inconnus tous dans des états plus ou moins pitoyables, certains déjà bien trop imbibés pour un début de soirée. ce n'était pas son genre, pourtant, de se perdre dans les nuits folles de la capitale, surtout pas en période scolaire - encore moins de s'y retrouver seul et abandonné, même si au fond il n'en était pas si surpris, il aurait dû le voir venir de plus loin de la part de son double. et pourtant, même après tant d'années, elle arrivait encore à abuser de sa naïveté. quel idiot tu peux bien faire, saya, sans déconner.

sa sœur avait toujours été du genre à participer à ce genre de soirées, elle. il se souvenait vaguement des années précédentes, aki réussissant brillamment la prouesse de rester en tête du classement des notes toute sa scolarité, tout en faisant irruption dans sa chambre afin de l'encourager à enjamber le rebord de sa fenêtre pour s'inviter à la fête d'anniversaire d'un quelconque type plus ou moins en vogue à ce moment-là la nuit venue. il avait toujours refusé, mais il n'avait jamais réussi à la décourager - et elle rentrait à la maison par cette même fenêtre, la seule donnant sur la rue, enfilant son uniforme l'air de rien, ne pouvant être trahie que par les quelques paillettes dans ses cheveux. elle n'avait pas changée, trois ans plus tard. elle se montrait juste assez persuasive, à présent, pour traîner un saya désespéré derrière elle, accompagné parfois de son cousin, toujours tout aussi partant. et que pouvait-il contre eux ? rien, rien du tout, alors il subissait et attendait patiemment qu'on le ramène chez lui.

évidemment, à peine arrivée elle avait cependant rejoint sa bande d'amis. et il se retrouvait au milieu d'une marrée humaine, l'odeur de l'alcool lui donnant la nausée, celle de la sueur des corps dansant autour de lui ne faisant qu'accentuer son dégoût, même si, extérieurement, son inquiétude était la seule émotion décelable sur son visage. il se devait de la retrouver, ou il allait devoir appeler un taxi, et il savait que la batterie de son téléphone n'allait plus tenir bien longtemps. il dû s'extirper du plus gros de la foule, repoussant aussi poliment que possible une jeune femme essayant de l'inciter à danser avec elle sur le chemin, avant de pouvoir à nouveau respirer, et y voir un peu plus clair. et alors qu'il se pensait hors d'atteinte, un sursaut traversa tout son corps lorsqu'un bras, apparemment masculin, vint encercler ses épaules. « on m’a dit que c’est toi qui revendait la meilleure came de tokyo. c'est quoi tes prix ? » il fronça les sourcils plus forts que jamais en plantant ses yeux sur le visage de l'inconnu qui venait de l'attraper, presque offensé, mais surtout confus. il me prend pour qui lui, là ? « pard- » le rire qui suivit lui donna d'abord le sentiment d'avoir affaire avec un des plus éméchés de la pièce, avant de réaliser qu'il se fichait tout simplement de lui.

un lourd soupir lui échappa. « hilarant. c'est pas que j'ai pas que ça à faire, mais si, alors maintenant je vais m'éloigner et prétendre que - » il se stoppa pour la deuxième fois en quelques minutes, étudiant minutieusement les traits du visage du perturbateur, sourcils toujours aussi froncés, presque plus expressifs que leur propriétaire. un petit clic se fit dans son esprit, un sentiment de déjà vu très appuyé faisant son apparition. oh, il connaissait ce visage. « on se connaît, non ? » ou peut-être qu'il débloquait, aussi. il n'était pas habitué à croiser des gens qu'il fréquentait dans ce genre de milieu. peut-être l'avait-il vu à la télévision ? ça paraissait surréaliste. et pourtant, il connaissait ce visage, peu importe d'où, il en aurait mis sa main à couper, son regard perçant presque des trous à travers sa peau tant il se faisait insistant à présent, espérant que lui puisse l'aider à mettre un nom sur ce visage familier.

Daiki tenta de reprendre son calme. Il avait rarement vu un froncement de sourcil aussi expressif et comique à la fois ! Le soupir exaspéré du jeune homme lui fit retroussé les lèvres dans un grand sourire dévoilant ses dents.

« Mah ~ Aller, c’était pour déc… Eh ? »
Il eut un léger haussement de sourcil. Il était un peu surpris. C’était tout de même rare qu’on le reconnaisse ! Surtout lorsqu’il n’y avait rien autour pour le rattacher au monde du sport. Il relâcha doucement les épaules du jeune homme et le dévisagea un instant, perplexe. Il doutait un peu que son interlocuteur soit fan de baseball. Mais pourquoi pas après tout ? A moins qu’il n’ait vu sa tête sur la dernière boisson énergisante en date ? Cette boisson était dégueulasse d’ailleurs. Daiki ne comprenait pas en quoi sa tête allait améliorer les ventes du produit. Et dire qu’on lui avait offert un carton entier de cette horreur liquide ! Quitte à devoir poser pour un sponsor, il aurait préféré que ce soit pour du matos de sport ou, au pire, avoir sa tête sur un emballages de patch antidouleur, comme ses senpais.

En attendant, c’était lui qui commençait à être mal à l’aise sous le regard perçant du jeune homme. Daiki cligna plusieurs fois des yeux avec confusion. Est-ce qu’ils se connaissaient ? Il n’aurait pas oublié une bouille aussi adorable, il en était certain ! Mais le doute s’insinua dans son esprit sous le regard insistant. Maintenant qu’il faisait attention à lui, Daiki se rendait compte à quel point l'inconnu était mignon. Il était presque tenté de reprendre son sérieux et de voir si oui ou non ils s’étaient déjà croisé.

Mais c’était plus fort que lui, il se rapprocha à nouveau avec un sourire taquin : « T’arrive souvent à pécho avec cette phrase ? » demanda-t-il avec amusement et un clin d’œil aguicheur. A défaut de retrouver ses potes, il semblait bien qu’il ait trouvé une nouvelle victime à embêter pour la soirée. « C’est un peu dépassé comme phrase d’accroche, babe. » Il fit mine de secouer la tête avec consternation. « Non, sérieusement, si tu as besoin d’entrainement, tu as de quoi faire ce soir ! » Daiki désigna la foule compacte en l’enveloppant d’un large geste du bras. « Je peux même te donner des conseils ! » le taquina-t-il en laissant échapper un petit rire.

à présent, saya le dévisageait, sans aucune gêne, trop absorbé par ses pensées. il y avait quelque chose de familier, définitivement, et ça commençait à lui torturer l'esprit. il n'avait pas bu d'alcool, il était donc en pleine possession de ses moyens - contrairement peut-être au jeune homme en face de lui - mais il lui était impossible de recaler un nom sur ce visage-là. peut-être qu'il l'avait simplement aperçu dans la rue ? peut-être qu'il était célèbre, aussi, même s'il était un peu perplexe face à cette idée-là. mais elle restait logique, saya ne regardait pas vraiment la télévision ni les news, il reconnaissait les personnalités de tokyo assez peu souvent, passant d'ailleurs pour un idiot auprès de sa sœur et sa bande de copains bien trop régulièrement à son gout.

le sourire qui étira bientôt les lèvres de l'inconnu lui fit réaliser qu'il n'aurait pas dû être aussi direct. de toute évidence, il était le seul à se souvenir vaguement de l'avoir croisé, et ça n'était pas vraiment pris au sérieux. il poussa un soupir, relevant les yeux une fraction de secondes. « t’arrive souvent à pécho avec cette phrase ? » bordel, pourquoi. et la suite de sa phrase ne fit que le désespérer un peu plus, le rouge lui montant aux joues. pour quoi passait-il, là ? il n'essayait pas de draguer, bon sang. il releva une de ses main pour repousser légèrement le jeune homme en arrière, avec maladresse, déglutissant. « c'est un malentendu - je ne cherche rien dans ce genre-là. » il claqua sa langue contre son palais, détournant le regard en espérant apercevoir sa soeur au loin, ayant grandement besoin d'une échappatoire. mais évidemment, aki n'était jamais là quand on avait besoin d'elle. et il ne pouvait même pas appeler son cousin pour qu'il vienne le sauver pour la énième fois dans son existence, puisqu'il se faisait dorer la pilule quelque part, hors du pays. il n'avait personne, il n'avait aucune issue. il était obligé de régler son problème tout seul. au moins cette fois, c'est pas la mafia ou je ne sais quelle connerie, tu peux le faire.

« je suis pas gay en plus, et puis c'est même pas la question ! » pourquoi est-ce que l'univers tout entier s'acharnait en permanence contre lui, déjà ? « j'ai juste une réelle impression de déjà vu. »[ autant être honnête, et essayer de paraître normal. il reprenait un peu d'assurance, parlant toujours assez fort pour couvrir la musique et évitant les quelques personnes passant sur son chemin. il rêvait de rentrer chez lui peut-être presque autant que de résoudre le mystère sur pattes en face de lui.  « t'es - un acteur ? un truc comme ça ? » il se devait de s'en assurer, non ? même si pour la peine, il était assez persuadé qu'une personnalité publique n'agirait pas ainsi.  alors qu'il se creusait toujours la tête, son estomac grogna, heureusement couvert par les bruits ambiants. aki lui avait promis qu'il y aurait au moins à manger, et comme toujours, elle m'a menti.

La réaction de l’inconnu était adorable. Il avait visiblement envie de fuir et Daiki se sentit un peu coupable de le mettre aussi mal à l’aise. Mais c’était marrant de le voir si confus ! Il avait atteint son but. « Ok, détend toi, mec, j’te charriais juste un peu. » Il lui poussa doucement l’épaule du poing pour l’embêter. « J’t’ai vue t’ennuyer tout seul dans ton coin, tu m’as fait pitié ! Je me suis dit qu’un peu de compagnie ne t’ferais pas d’mal ! » Ce n’était pas la chose la plus sympathique à dire mais c’était une partie de la vérité. L’autre étant que lui-même avait perdu ses potes et se sentait un peu seul parmi cette foule d’inconnus.

Daiki eut une moue dubitative. Le jeune homme ne lui disait toujours rien. Mais il était plutôt nul pour retenir un visage. Il en croisait tellement ! Surtout en pleine saison sportive. Entre les sponsors, les managers, les coachs, les membres de la ligue, le staff du stade, le service médical, les membres de l’équipe, les journalistes, et les fans, il savait rarement où donner de la tête. Il s’était déjà retrouver dans des situations embarrassantes où il lui était impossible de mettre un nom sur un membre important de la ligue. Ça lui avait déjà causé quelques ennuis.
« Non, je ne suis pas acteur. » rigola-t-il, amusé par l’idée, en secouant la tête. Il n’y avait pas plus mauvais acteur que lui selon sa sœur et en même temps, il arrivait souvent à berner son monde lorsqu’il se mettait en tête de réalisé une farce ! Il jeta un coup d’œil à son smartphone. Il était déjà minuit passé, presque une heure, et il avait reçu un nouveau message de My Girl, autrement dit, sa sœur. Daiki secoua la tête en soupirant discrètement et ne prit pas le temps de le lire.  Elle devait insister sur l’histoire de capote et apparement aucun de ses potes ne s'inquiétaient de son absence. Il remit le téléphone au fond de sa poche et se concentra à nouveau sur sa victime du soir dont il ignorait toujours le nom. « Visiblement, t’as aussi perdu t’es potes, » remarqua-t-il. En tout cas, c'était l'impression qu'il lui donnait depuis le début de la soirée.  « Perso, je ne m’attends pas à avoir des nouvelles des miens avant demain. Ça t’dit qu’on s’arrache d’ici ? »

Il attendit sa réponse avec incertitude. Il ne s’était pas montrer des plus sympathique et il avait conscience d’avoir été un peu lourd. Il afficha pourtant une assurance sans faille en adoptant une pose décontractée avec un sourire amical, un regard interrogateur et en enfonçant nonchalamment les mains dans les poches de son jean.

Il avait bien compris au fond que cette histoire de came était une blague, mais comment était-il supposé savoir que le reste aussi ? les gens étaient tous plus étranges les uns que les autres dans ces soirées, il l'avait appris à ses dépends à force d'y être entraîné, alors pour le coup, il n'avait pas considéré ce type-là différent. mais à force de l'observer, il se rendait compte qu'il l'avait peut-être jugé un peu trop vite. il n'était pas habillé trop étrangement, il tenait bien sur ses deux jambes, et il était cohérent - il n'était donc sûrement pas saoul, et il ne semblait pas avoir pris de substance illicite non plus. il n'avait pas vraiment l'allure du mec qui se rendait-là uniquement pour draguer non plus, à vrai dire.

il fronça à nouveau les sourcils, mais seulement quelques secondes, lorsque l'autre garçon se mit à regarder son téléphone. et il décida d'en faire de même - puis se ravisa en réalisant, à peine essayait-il de le sortir de sa poche, qu'il était éteint. un lourd soupir lui échappa. un jour, je vais me souvenir que ces merdes ont plus de batterie après deux heures, un jour. de toute façon, il ne devait pas y avoir grand chose d'intéressant dessus, il se doutait que sa sœur lui avait peut-être envoyé un message ou deux, mais elle n'insistait généralement pas plus que ça, comme si le saint esprit lui-même lui garantissait qu'il rentrerait à la maison en chair et en os, même après toutes ces fois où ryû avait dû lui sauver la vie.

« visiblement, t’as aussi perdu tes potes. » si seulement, mais il était encore plus pitoyable que ça. il passa sa langue sur ses lèvres, observant encore une fois autour de lui. « c'est pas vraiment mes potes mais .. si on veut. » elle ne lui donnerait plus signe de vie avant le lendemain matin, comme ça avait été le cas à chaque soirée, sans aucune exception, où elle l'avait embarqué. et elle l'appellerait en pleine après-midi, sans même s'inquiéter de quand et comment il avait réussi à rentrer chez lui. comment pouvaient-ils être jumeaux, déjà ? « perso, je ne m’attends pas à avoir des nouvelles des miens avant demain. ca t’dit qu’on s’arrache d’ici ? » ça, c'était une nouveauté qui changeait un peu des autres fois. et pourquoi pas, après tout ? il ne le connaissait pas - si, il le connaissait, il en était persuadé, mais il ignorait ce fait pour le moment - et il ne savait pas sur qui il pouvait bien tomber, mais il avait déjà fait des mauvaises rencontres, et il avait toujours réussi à se rendre compte par lui-même qu'il ne fallait pas les suivre. ce jeune homme-là semblait profondément normal, en comparaison, voir même sympathique. le fait même qu'il l'ait approché le prouvait, même si les motivations n'étaient pas forcément les meilleures. il étira finalement un sourire, le premier de la soirée, se détendant. « pourquoi pas, au moins j'aurais un truc à raconter à ma sœur demain. » et il claqua sa langue contre son palais, finissant par se dire qu'il allait peut-être s'amuser ce soir, tout compte fait.