shuddup. + jaehyun

Allongé au milieu de son immense lit, Eizo faisait des mouvements brusques. Son corps était comme prit de spasmes, et des gouttes de sueur perlaient sur sa peau laiteuse. Parfois, de petits gémissements quittaient ses lèvres, et ses mains étaient crispées, emprisonnant les draps. De nouveau, le garçon était en pleine terreur nocturne. Il voyait des cadavres partout, du sang, et d'autres choses affreuses dont nous allons taire l'existence. Sa respiration se faisait de plus en plus difficile, commençant même à s'étouffer. Mais d'un coup, il se redressa, tout en poussant un cri presque strident. Les yeux écarquillés, des larmes se mêlaient désormais à la sueur sur son visage. Tremblant de partout, le garçon se saisit difficilement de son portable, le faisant même tomber plusieurs fois au sol. Lorsqu'il réussit enfin à le poser devant lui, l'écran déverrouillé, il appela le premier numéro de son répertoire, et attendit plusieurs sonneries, tout en reniflant et s'essuyant en vain les joues. La voix de Jaehyun parvint enfin à ses oreilles, mais la seule chose qu'il réussit à prononcer fut « viens. ». Eizo raccrocha de suite, sans rien expliquer, sachant pertinemment que son aîné avait comprit. Il se recoucha donc, mais cette fois-ci en boule, sous ses draps, commençant à se ronger les ongles, dans le maigre espoir de se calmer. Néanmoins, son corps restait pétrifié, et les tremblements ne cessaient guère. Ses larmes également continuaient de dévaler vulgairement ses joues, et la respiration du châtain se perdait dans ses sanglots. Pourquoi diable avait-il fallut que Jaehyun dorme à son appartement ce soir là ?! Pourquoi ce sale clebs n'était jamais là quand on avait besoin de lui ?! Tôt ou tard, Eizo lui imposerait de vivre avec lui. Cette distance, cette séparation était ridicule. Sa place était ici, dans cette chambre, dans ce lit. Et nul part ailleurs.

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Les vibrations l’arrachent des bras de Morphée alors qu’il tâtonne sa table de nuit à la recherche de l’appareil frémissant. Aveuglé par la luminosité soudaine, il réussit à déchiffrer le prénom du correspondant ; devine dans la seconde de quoi il s’agit malgré son esprit brouillé par la fatigue. Il se redresse dans les draps froids, déverrouille son téléphone en se massant les tempes. « Allo ? »
Un ordre. Sec et bref à travers des sanglots. La routine. Il s’autorise quelque secondes pour reprendre ses esprits avant de se lever ; revêtir une tenue décontractée à mille lieues des chemises parfaitement repassées, des chaussures cirées hors de prix. Un bas de jogging, un pull à manches longues ; parce que cette nuit, il n’est plus que Jaehyun. L’ami. L’amant.
Il dévale la cage d’escaliers pour sortir du bâtiment en trombe, joues fouettées par le vent nocturne alors qu’il rentre dans la voiture aux vitres teintées. Les yeux à demi clos par la fatigue, la bouche encore pâteuse et les cheveux emmêlés. Cette nuit, il n’est plus que Jaehyun.
Jaehyun qui le prendra dans ses bras. Qui le rassurera. L’embrassera, s’il ose. Touchera l’âme du gamin du bout des doigts ; l’enfant aux mille démons.
Il entre dans la propriété sans problèmes. Salue le vieux gardien habituée aux visites noctambules du coréen ; il l’encourage d’un bref sourire alors que l’esclave se rue dans la maison, les jambes le mènent automatiquement dans la chambre du garçon.
Un soupir lorsqu’il l’aperçoit. Peut-être d’exaspération ; de pitié. Ou de fatigue. Il s’approche calmement du berceau des cauchemars ; prend place aux côtés du nippon éploré. Une main s’aventure dans le champ de blé d’Eizo alors qu’il le rapproche un peu plus de lui, tentant de le calmer par sa chaleur et sa voix habituellement rauque qu’il adoucit en murmurant du réconfort. « C’est bon, calmez-vous. Je suis là. » Timide baisé sur la tempe ; les lèvres tremblent alors qu’il finit par le serrer contre son torse, la main caressant ses cheveux dans une cadence régulière. « Concentrez-vous sur ma respiration. »

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Son cerveau aimait le torturer. Il aimait jouer avec ses nerfs, et l'affaiblir avec ces crises à répétition. Mais ce qu'Eizo n'avait pas encore remarqué, après toutes ces années, c'est que les trois quarts du temps, ces terreurs nocturnes se produisent lorsque son fidèle et dévoué -n'en ayant de toute manière pas le choix- coréen ne dort pas dans sa demeure. Comme si elles étaient là pour lui rappeler ô combien il était dépendant de Jaehyun, ô combien il était si misérable sans lui. Sauf qu'honnêtement, le garçon s'en serait volontiers passé. En boule sous ses draps, l'attente lui parut telle une éternité. Qu'est-ce qu'il foutait bordel ? C'était pas si compliqué s'enfiler un vieux pantalon, un t shirt et prendre la voiture ! Eizo bouillonnait. Il avait envie d'exploser, de toute envoyer en l'air dans sa chambre. Mais son corps l'en empêchait. D'ailleurs bien trop perdu dans ses sanglots, il ne remarqua la présence de son chien de garde uniquement en sentant la main de celui-ci dans ses cheveux. Et de suite, comme par un réflexe de survie, il se colla au corps musclé de Jaehyun, recherchant par ce mouvement tant de chose. De la chaleur, de la protection, et de la tendresse. La voix si grave mais délicieuse du brun le fit frissonner. Ses doigts meurtris quittèrent sa bouche pour venir s'accrocher fermement au haut de son amant, tandis que son front humide -comme tout le reste de son visage d'ailleurs- se colla au torse du plus âgé. Eizo tenta d'appliquer le conseil, c'est-à-dire de calquer sa respiration sur celle de Jaehyun, mais en vain. Il était prit d'une crise bien trop importante pour pouvoir réaliser cet acte. Frustré, agacé, épuisé, le garçon n'en pleura que davantage, et finit même par tousser tant ses sanglots et ses inspirations ne faisaient pas bon ménage.

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Des sanglots à en arracher le plus solide des coeurs ; ils ont réussit à percer celui du coréen, au début. A présent habitué, il se laisse bercer par la monotonie des pleurs en soupirant discrètement. Il s'est juré -leur a juré de le protéger, prendre soin de l'héritier comme si sa vie en dépendait, alors ils s'applique à la tâche avec une passion presque malsaine. Il a apprit à serrer les dents face aux remarques, aux ordres crachés sans humilité. Rester droit lorsqu'un poing vole sur sa mâchoire maintenant immunisée à la douleur. Les mots crus  du japonais ne lui font plus aucun effet ; ils sonnent presque comme des mots doux à ses grandes oreilles.
Parce qu'au fond, Eizo, c'est juste un gosses tombé entre les mauvaises mains ; celles salies par les crimes et le sang d'innocents. L'âme corrompue dès son plus jeune âge, lui aussi il n'est qu'un robot. Un gamin perdu à la peur qui lui serre le gosier, même s'il ne veut pas se l'avouer et jouer la tête dure, Jaehyun a réussi à le percer. Alors il ne dit rien. Le serre un peu plus fort tandis que la main de son cadet arrache son pull mouillé par ses larmes.
Il fini par relever sa tête, l'obligeant à le regarder. Le regard qui perce l'âme, d'une douceur incontestée, rarement révélée chez le coréen. Il passe ses doigts sur les joues rougies, inondées de l'hériter, dépose ses lèvres sur son front dégagé.  « Ce n'était qu'un rêve, vous êtes dans la réalité, maintenant. C'est fini. » Mais peut-être qu'au fond, la réalité est bien plus terrible.  « Je ne laisserai jamais rien vous arriver. »

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Dans ces moment là, il n'était plus l'héritier violent et pervers. Il n'était qu'un gamin traumatisé à la recherche d'une branche à laquelle se raccrocher. Car au final, elle était là la vérité : Eizo était bien loin d'être aussi fort et machiavélique qu'il le laissait croire. Il était simplement perdu, apeuré par ce monde si sombre dans lequel il vivait depuis presque vingt-et-un ans. Ce qui le maintenait encore en vie, c'était Jaehyun. C'était le fait de pouvoir le contrôler à sa guise, d'en faire sa chose. Il avait besoin de ce plein pouvoir sur son chien pour servir qu'il servait encore à quelque chose. Mais il n'était pas dupe. Il savait que comme tour clébard, son aîné pouvait l'abandonner du jour au lendemain pour un maître plus affectueux. Et le garçon vivait avec cette peur, constamment. On ne peut faire confiance à personne dans ce bas monde. Prit dans ses tourmentes, Eizo suivit le mouvement imposé par le plus âgé et releva la tête. Docilement -ce qui n'arrivait que lors de telles crises- il le laissa faire, mais les mots qui arrivèrent à ses oreilles le firent réagir. Il dégagea brusquement les mains de Jaehyun et se redressa, l'incendiant. « Tu mens... Tu mens !! T'es exactement comme les autres !! T'attends qu'une chose : que je crève pour te casser !! T'en as rien à foutre de ma gueule !! Dès que j'ai le dos tourné t'en profite pour me trahir !! ». Ses sanglots reprirent de plus belle et Eizo, tout en restant assit, se recroquevilla, cachant son visage dans ses bras. Il ajouta alors, malgré la difficulté à articuler : « J'vous en ferai ce plaisir, un jour. ». Le suicide ? Cela faisait depuis bien longtemps déjà qu'il y songeait. Il ne savait pas ce qui l'avait retenu tout ce temps de le réaliser.

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Il n’a jamais osé rêver partir. Endoctriné dès son plus jeune âge, il vit dans l’ultime conviction que servir les Inagawa est sa destinée ; qu’il crèvera d’une balle prise pour Eizo. Parce qu’il a été mis sur cette terre pour lui, il la quittera pour lui aussi. Mais si on lui offrait la possibilité de quitter cette vie ; qu’on lui servait une liberté sur un plateau d’argent, alors il la saisirait. Les chaînes pesantes qu’il porte aux pieds depuis sa naissance commencent à lui gratter les chevilles, Eizo ne fait que renforcer la douleur en tirant dessus. Son maître. Jaehyun, un aussi grand gabarit ; soumit au morveux des Inagawa. Le pourri gâté. Le gamin qui n’a rien connu d’autre que la richesse et les billets, le pouvoir et la dominance.
Mais il a aussi connu la mort, rejouée devant ses yeux alors innocents, sans cesse. Un endurcissement, rite de passage chez les yakuzas que l’héritier n’a pas supporté, qui le hante encore aujourd’hui, tourmente ses rêves noircis par des nués d’ombres qui lui collent à la peau. Gosse déchu au destin amèrement tracé. Ses traits angéliques ne sont que le masque du diable qu’on a fait de lui.
Alors oui. Il y a une part de vérité dans les paroles du démon. Jaehyun se rêve affranchi ; de partir, loin d’ici. Mener la routine que le peuple tente d’éviter à tout prix. Parfois, après les crises de nerfs de son cadet, quand ses traits sont bleutés par les phalanges, les côtes brisées par la pointe de ses chaussures cirées, il observe son armoire. Rêve d’y attraper un strict minimum ; monter dans le premier train.
Mais l’amour l’en empêche. L’espoir aussi, parce qu’il se noie dedans ; celui d’un jour voir Eizo s’adoucir, et qu’tout le monde puisse enfin découvrir sa lumière. Pas le gosse en larmes devant lui.
Il se redresse, attrape la tête du nippon une nouvelle fois pour le forcer à la relever. Ses mains aussi grandes que son visage attrapant ses joues délicatement rosées d’une douceur sans pareille. Il finit par oser ; oser poser ses lèvres sur celles du torturé. Deux pulpes salées qu’il manipule avec délicatesse, ses doigts vaguant sur la nuque de son maître avant qu’il ne le force à se serrer contre lui. Murmures rocailleux au creux de l’oreille tandis qu’il berce le poupon corrompu. « C’est faux, tu le sais. » Tutoiement qui s’échappe parfois lors du manque de proximité. Il se rattrape, renforçant l’étreinte empourprant ses pommettes. « Ne suis-je pas là depuis votre naissance ? Je tuerai pour vous, je suis la seule personne en qui vous pouvez avoir entièrement confiance. Et si vous venez à mourir, alors je vous suivrai, sans hésiter. »

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Il haïssait la terre entière. Mais surtout les personnes qui formaient son entourage, plus ou moins malgré lui. Il haïssait sa mère, pour l'avoir abandonné au destin noir et tragique des yakuzas. Il haïssait son père d'avoir exposé à ses yeux alors d'enfant innocent des exécutions sordides. Il haïssait le personnel de son clan, qui respiraient l'hypocrisie et le vices. Mais surtout, il haïssait Jaehyun, pour tant de choses. Pour le rendre autant dépendant, pour lui faire croire de belles paroles, pour oser le faire sien alors qu'il n'était qu'un vulgaire esclave. Eizo savait que tout était faux. Que la docilité, la soumission, les mots, les sourires, les attentions de son aîné n'étaient guidés que par l'obligation de son statut et la peur de représailles venant du clan. Personne n'aimait Eizo. Personne ne se souciait réellement de lui. Recroquevillé, il fut surprit par le baiser. Putain. Il aimait tant les lèvres de son connard de clébard.
Sans le vouloir, le garçon se retrouva de nouveau collé à ce torse musclé. Mais le tutoiement de la part de Jaehyun renforça sa colère. D'où se permettait-il un telle liberté ? Juste car le châtain était en pleurs, il pensait pouvoir se libérer un instant de son statut ? Fronçant les sourcils, il serra les dents et repoussa brusquement le plus âgé, dont les propos ne cessaient de nourrir sa rage et sa douleur. « TA GUEULE !! Tu dis ça uniquement car c'est ton rôle !! T'as juste pas le choix !! ». Le voyant approcher ses mains de nouveau de lui, Eizo les lui repoussa avec écœurement et violence. « Ne me touches plus !! Ne me touches plus jamais !! Arrêtes de me salir !! Comment oses-tu poser tes mains dégueulasses sur moi ?! Et tes lèvres qui sont allées trainer chez d'autres !! Je ne suis pas comme ces sous-merdes que tu baises quand j'ai le dos tourné !! Tu me répugnes. ».

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Le coréen a eu toute une vie pour apprendre à apprécier son maître. Avant même la naissance de ce dernier, on a dû l’obliger à l’aimer. Le gosse inexistant et sans prénom prenait déjà une place trop grande dans son cœur alors candide. Mais il l’a aimé, dès la seconde où il a posé les yeux sur lui. Petite chose naïve et innocente, trop pure pour être tombée entre les mains de cette famille ; et il a assisté à sa déchéance d’un œil impuissant. Adolescent, il se tenait derrière lui, les traits durcis alors qu’il observait des hommes se faire abattre devant ses yeux vitreux, finissait par détourner le regard sur Eizo, l’enfant souillé. Il se souvient des larmes et des cris du début, puis l’évolution de ce qu’il est à présent ; gamin violent, pourri gâté, impassible à la douleur des autres.
Il a vu Eizo naître. Il a entendu ses premiers mots, observé ses premiers pas. Partagé ses premiers jouets et ses premiers pleurs. Une vie entière passée aux côtés du morveux qu’il considère comme la moitié de son être.
Alors oui ; les mots blessent. Chacun d’eux. Parce qu’il aimerait lui crier que bordel, il a tort. Qu’il l’aime et qu’il crèverait pour lui, se tirerait une balle dans la tempe, s’il lui demandait. S’jetterait dans un ravin, s’il l’en obligeait. Il essaye de se rattraper, ses mains cherchant le visage du japonais avant que ce dernier ne le repousse hargneusement. Sa colère oblige Jaehyun à se lever, s’inclinant à plusieurs reprises devant le maître fumant. « Je suis désolé. Pardonnez-moi. » il pensait pouvoir profiter de son bref instant de faiblesse pour le faire sien, ne serait-ce qu’une seconde. Au final, tout c’qu’il a fait c’est foutre en l’air l’opportunité de l’avoir près de lui.  Alors il se confond en excuses, reprenant rapidement sa position d’esclave.  « Pardonnez-moi… Je… » Il bafouille, un rare faux pas qui le surprend discrètement. Fini par se redresser en essayant de reprendre ses esprits brouillés par la fatigue. « Je vais finir la nuit ici. Je serai devant votre porte, si vous avez besoin de quelque chose. » Enième inclinaison, il se retourne afin de se diriger vers la porte de l’immense chambre, décidé à garder l’antre de l’agneau comme un chien de garde.
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Dans cette famille si puissante et où la hiérarchie était respectée scrupuleusement, Eizo était le roi. Faute d'être le digne héritier si longtemps désiré, son statut était parvenu, avec les années, à surpasser celui de son père. Car s'il venait à mourir, l'empire Inagawa se retrouverait menacé. Il faudrait refaire un enfant, un garçon qui plus est, reprendre à zéro ce lavage de cerveau intensif. Et son père n'avait pas le temps pour cela. Puisque tout le monde sait que l'espérance de vie d'un yakuza est une chose complètement hasardeuse. On ne peut prévoir leur mort. Alors, oui, le garçon était au sommet. On obéissait à chacun de ses désirs, chacun de ses ordres. Pourtant, tout ne lui était pas possible, pour sa grande frustration. Et en partie concernant Jaehyun. Si leurs rôles impliquaient une obéissance totale de la part du plus âgé pour son maître, celui-ci ne pouvait pas le contrôler dans les moindres détails. Il ne pouvait pas planifier sa vie de A à Z ni en imposer un style dans les moindres détails. Et cela comprenait entre autre la vie sexuelle de son clébard. Eizo voulait être le seul. Mais cela, il ne pouvait l'avouer. C'est pourquoi savoir qu'un ou qu'une autre avait le droit à sa chaleur, à ses caresses, ses baisers, le rendait fou. Il se sentait tellement sale, de passer après eux. Fixant son garde du corps quitter le lit et s'incliner à maintes reprises n'apaisait en rien sa colère. Il en était complètement indifférent. Reniflant bruyamment, le japonais s'essuya négligemment les joues et les yeux. La fatigue embrumait son esprit. Mais en entendant la décision de Jaehyun, il posa son regard sur la grande silhouette qui s'éloignait de lui. « YAH !! Tu te fou de ma gueule ?! D'où tu te casses sans ma permission, hein ?! J'ai pas finit de parler !! ». Le clébard se rebellait ? Attrapant des objets sur sa table de chevet, Eizo les lui lança dessus. « Non en fait, t'as raison, casses-toi !! Définitivement !! T'es viré !! J'veux plus jamais voir ta sale gueule d'hypocrite !! Retournes fourrer ta queue dans ces culs qui visiblement te donnent bien plus de plaisir !! Vas te choper des mst avec tes putes, vas !! ».

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Si Jaehyun n’était pas programmé pour lui obéir ; si son maître n’était qu’un enfant quelconque, un gosse capricieux d’une modeste famille, et s’il osait, il lui aurait sûrement craché des paroles hargneuses, sans sentiments et d’une sincérité glaçante. T’es rien, gamin.  Juste un morveux misérable et mort de trouille qui a besoin d’rabaisser les autres pour se sentir vivant. Trop faible, tu survivrais pas deux minutes sans l’aide de tes chiens ; sans mon aide. Ton nom de famille te donne des ailes qu’on couperait bien trop facilement si cette dernière venait à tomber, et dans ce cas-là, tu t’retrouverais tout seul. Parce que t’auras plus aucun pouvoir sur moi et que j’serais plus obligé d’te protéger. Et moi j’te rirai au nez.
Des paroles qu’il ne pense qu’à moitié, mais qui lui brûlent le gosier. Parce qu’il a envie de le blesser autant qu’il le blesse ; parce que garder cette expression marmoréenne constante lui donne des crampes et que parfois, il a envie d’gueuler.
Mais il s’rappelle qu’au fond, Eizo n’est qu’un sale gosse un peu perdu et qu’une trop grande pression pèse sur ses épaules ; celle d’un héritage qu’il n’a jamais choisi. Alors il serre les dents, esquive les objets volants en soupirant discrètement. Palpitant serré par les mots du rebelle, il se mord la lèvre pour ne pas rétorquer, les paroles gelées restent coincées entre sa gorge serrée. Mais son regard, dur malgré lui, se plante dans les yeux du métis aigri. Non, il ne lui fait pas peur ; pas en lui-même. Il sait qu’il pourrait aisément le maîtriser par sa force et son expérience supérieure à la sienne.
C’est son pouvoir qui lui fait peur. Parce que contrairement au coréen, Eizo n’a pas une once d’attachement envers son garde du corps. Il le ferait exécuter sans préavis, se trouverait un nouveau chien de garde dans l’heure qui suit. Alors il essaye de se contenir malgré ses yeux plissés par la colère engendrée par ses paroles en l’air.  Il incline légèrement la tête sur le côté, cache un rictus malsain sur ses maigres lèvres. « Très bien. Etant viré, je me permets de vous souhaiter bonne chance dans la recherche d’un nouveau personnel qui pourra supporter vos sautes d’humeurs, vos caprices enfantins ainsi que votre manque de reconnaissance et votre impolitesse malsaine. Je vais à présent rassembler mes affaires, si vous le voulez bien. » oh, bordel, c’qu’il regrette ; mais qu’est-ce que ça fait du bien. Il s’prépare à la retombée, le cœur soudainement un peu léger.  

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Pourquoi Jaehyun allait-il voir ailleurs ? Qu'avaient donc ces autres que lui ne possédait ? Pourquoi arrivait-il à trouver du plaisir dans d'autres bras ? Etait-il donc si mauvais ? Le forçait-il à simuler depuis tout ce temps ? Eizo avait mal. Terriblement mal. Lui qui déjà éprouvait une haine certaine pour son corps frêle et son visage juvénile, voilà qu'en plus il était un mauvais amant. Il ne savait définitivement rien faire de correct dans sa vie. Si même son clébard préférait la bouffe d'à côté, à quoi cela lui servait de rester ? Le regard que lui adressa alors Jaehyun lui glaça le sang. C'était la première fois que ses yeux dégageaient quelque chose de si sombre, de si mauvais. Et cela lui était adressé à lui. De puis, les paroles de son aîné lui transpercèrent le cœur, pour n'en faire que de la charpie. Alors, c'était ainsi qu'il le voyait ? Comme un gamin capricieux, insupportable, impoli ? Les mots doux qu'il avaient osé lui confesser étaient donc faux. Tout est faux. Comme Eizo s'en doutait depuis le départ. Depuis toujours. Malgré lui, ses larmes se remirent de plus belle à dévaler ses joues rougies, et le garçon serra ses draps dans ses mains, désormais crispées. « Tu vois... J'avais raison... J'avais raison !! T'es qu'un connard !! Il ne te suffit que deux secondes pour m'abandonner !! T'en à rien à foutre de moi !! J'ai jamais été important à tes yeux !! Tu me déteste, comme tous les autres !! ». La gorge du châtain se serrait, et lui était à présent très douloureuse. Mais il ne pouvait pas s'arrêter, et sa voix devenait de plus en plus puissante, et stridente. « Vas te faire foutre !! Disparais !! T'es comme elle, tu veux pas de moi, alors supprimes moi de ta vie !! Jm'en fou !! Offres tes mensonges à d'autres !! J'aurai jamais dû te faire confiance !! ». Se penchant en avant, le corps affaiblit, ses larmes s'écrasaient sur son matelas, et il toussa, recommençant à s'étouffer à cause de ses sanglots. « Dis le... Dis ce que tu penses de moi !! Vas y, assumes !! Dis tout haut que j'suis qu'un bon à rien, une merde, un salaud, que j'mérite pas de vivre !! Vides ton sac !! Sois le vrai Jaehyun, pas ce faux soumis au sourire hypocrite !! ».

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Gosse capricieux, trop choyé, foutu sur un piédestal depuis la matrice ; cela ne l’a rendu que plus hargneux, malsain et insensible. Le monde à ses pieds, il pense pouvoir se sortir de toutes les situations. Et c’est c’que Jaehyun essaye de lui montrer ; c’est qu’il y a une vie derrières les jolis ornements, la tapisserie veloutée contre le mur de sa chambre. Y’a tout un monde dans lequel Eizo sera vilement jeté à la mort du paternel. Un monde où les personnes de confiance ne se lisent que sur une main, et il faut les garder le plus proche possible, mais pas en les envoyant paître, pas en les utilisant comme de vulgaires pantins. Parce qu’après, eux aussi ils finissent par se retourner contre vous ; et ça fini en giclé de sang dans une ruelle mal éclairée. Corps gisant, hiérarchie brisée ; anarchie créée.
Eizo ne se rend pas compte de l’importance de son statut, l’utilise seulement comme une excuse pour arriver à ses fins. C’est un gamin brisé, Jaehyun le voit bien ; encore plus maintenant qu’il éclate en sanglot devant son corps désolé. Giflé par le regret, son visage durci s’apaise, ses yeux fixant l’enfant meurtris dans une once de pitié saine. Il voudrait lui dire qu’il regrette. Qu’il n’en pensait pas un seul mot ; mais ce serait mentir. Mais il pourrait lui dire la vérité ; que malgré ses défauts, son caractère tempétueux et ses paroles nocives, il reviendra toujours vers lui. Parce qu’il l’aime, et que bien sûr, ça finira par le perdre. Il s’approche du lit immense d’un pas hésitant, se baisse à la hauteur du gosse pour poser délicatement une main sur la sienne serrée dans les draps. Sa voix rocailleuse, murmurée suavement se veut apaisante, rassurante. Tout ce dont l’hériter a besoin présentement. « A quoi bon vous dire ce que je pense de vous ? Vous ne croirez que ce que vous voulez croire. » A quoi bon lui dire qu’il l’aime, ce merdeux, et qu’ça le détruit ? Pour recevoir un poing dans la mâchoire ?  Recevoir d’autres paroles acerbes ; rabaissements moraux dont le japonais est expert ? Il soupire, son pouce caressant d’une tendresse calculée la main rougie du cadet. Il hésite un temps, fini par soupirer en s’asseyant au rebord du lit. « J’ai toujours été sincère envers vous ; je ne vous ai jamais menti. Peu importe ce que vous pensez, j’arrive à passer outre vos nombreux défauts et voir le bon en vous. Croyez-vous vraiment que je vous aurais dédié ma vie, si je ne vous aimez pas ? Que je n’aurais pas fuis ? Je suis toujours là pour une raison. J’encaisse vos sautes d’humeur et vos caprices parce que je ressens un profond attachement à votre égard. » Etonné d’ouvrir son cœur d’une façon aussi détachée, il enchaîne avant que la retombée ne lui gifle le visage. « Permettez-moi de vous donner un conseil. Ne repoussez jamais les personnes accourant chez vous à une heure aussi tardive ; encore moins si ces mêmes personnes vous tendent leur épaule pour pleurer. Elles seront vos meilleurs alliés, les seules sur qui vous pourrez compter lorsque vous prendrez la place de votre père. » Ne me repoussez pas.
Il soupire, décolle son arrière-train du matelas pour faire à nouveau face au cadet, raide comme un piquet ; prêt à subir une nouvelle colère incontrôlée.

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Jaehyun était tout ce qui lui restait. Il voulait lui offrir une confiance aveugle, car il était bien la seule personne à être restée à ses côtés lors de ses bientpot vingt-et-unes années. Il lui avait changé les couches, apprit à marcher, à compter, avait passé des heures à jouer avec lui, à l'aider pour ses devoirs, à le défendre quand d'autres gosses se moquaient de son visage aux traits métissés. Mais son père lui avait enseigné la méfiance. Il lui avait prouvé qu'une confiance trop importante pouvait s'avérer dangereuse. Que les gens n'étaient jamais complètement sincères, qu'ils agissaient uniquement selon leurs besoins, et le but qu'ils s'étaient fixés. Et puis, les statuts qu'ils possédaient tous les deux, avec le temps, devenait de plus en plus une source d'incertitude. Eizo avait peur que, comme les adultes de son entourage, le plus âgé ne soit gentil envers uniquement à cause de ce fameux rôle d'homme à tout faire. Qu'il ne lui jette de la poudre aux yeux depuis toutes ces années, car il était conditionné pour cela. Le châtain était perdu, entre ses peurs et son cœur. Son frêle corps de nouveau prit de tremblements, il laissa Jaehyun le toucher, trop perdu dans sa crise. Il écouta attentivement ses mots, mais comme l'homme le dit si bien, il n'y croyait que ce dont il voulait. Ou plutôt, ce don l'enseignement de son père lui imposait de croire. Reniflant et sanglotant, Eizo garda la tête baissée, même quand son aîné se mit debout face à lui. D'une voix cette fois-ci extrêmement basse et hachurée, il répliqua. « T'en es obligé... De me dédier ta vie... De venir à moi à une heure comme ça... Si tu avais un simple rôle... comme jardinier ou cuisinier... tu ne ferais pas tout ça... C'est pas de l'attachement... ». Décrispant difficilement ses mains, il s'essuya de nouveau les joues, retournant dans une phase plus calme, bien que ses larmes n'arrivaient pas à s'arrêter de couler. « J'veux pas... que tu m'abandonnes... J'ai que toi... Ne t'occupes que de moi... Arrêtes de donner ton corps à d'autres... T'es à moi Jaehyun... Ils ont pas le droit... T'as pas le droit... ».

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La sincérité déversée à travers ses paroles presque murmurées, Jaehyun a toujours été trop doux avec son cadet, bien qu’on lui ai demandé le contraire toute sa vie. « Endurcie le ! Apprends lui la méfiance, apprends lui que tout le monde part un jour ; apprends lui à être indépendant. Ne lui offre aucun amour et ne t’attaches surtout pas à lui ». Mais le coréen s’est toujours tué à essayer t’attiser cette minuscule flamme d’humanité en son cadet, une flamme qui n’a fait que s’affaisser avec le temps, faisant de lui l’homme qu’il est aujourd’hui ; vile, sauvage et indomptable. Mais le garde du corps arrive à l’apercevoir, cette étincelle chancelante. Dans les moments comme celui-ci, où le trop plein de haine déborde en son être et s’échappe en un torrent de larmes incontrôlables. Et ça l’attendrit presque, ça le fait sourire derrière son masque impartial.  Il se dit qu’il y a peut-être de l’espoir pour lui.
Il soupire, raide comme un piquet face au petit être faiblard en face de lui. « J’y suis obligé, oui. Néanmoins, je ne suis pas obligé de vous consoler. Je ne suis pas obligé de rester de marbre face à vos médisances et votre méprit. N’importe qui aurait pu abandonner, fuir cette vie de soumission. En vingt-et-une années, je peux vous dire avec certitude que l’attachement que je vous porte est bien réel, que mes actions ne sont pas forcées. » les mots formels dégoulinent de ses lèvres émaciées. Ils auraient pût avoir une toute autre relation. Boire quelques bières ensemble, rire devant une mauvaise comédie et se tutoyer, mais le japonais en a décidé autrement.
Et le garde du corps baisse les yeux dans un moment de faiblesse, profitant que le regard de son cadet ne le suive pas pour laisser s’échapper une expression désappointée. Il n’est qu’un jouet pour lui. Un objet, une possession qu’il désire contrôler, façonner comme bon lui semble. Il relève le menton, reprenant une expression neutre après avoir déglutit. « Je ne peux vous promettre une telle chose. Très bientôt, mon père me choisira une épouse qui devra enfanter le futur gardien de votre héritier. Cela ne veut pas dire que je l’aimerai ; mais je serai obligé de m’en accommoder. Je ne suis rien d'autre que votre gardien. Le contrat ne stipule pas que je dois vous appartenir de cette façon ; j'ai tous les droits sur mon corps, et sur les personnes autorisées à le toucher. »

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Il y avait deux raisons pour lesquelles il détestait autant le fait que Jaehyun couche avec d'autres personnes. La première est dut à sa maladie d'hypocondriaque. Faute de ne pas connaitre ces personnes, il ne peut pas analyser leur hygiène. Ainsi, s'ils possèdent des maladies ou autres facteurs à risques, ceux-ci vont s'incruster à son garde du corps qui ensuite, en le touchant, vont se retrouver sur lui, ce dont il ne voulait absolument pas. L'autre raison était bien plus personnelle. Eizo avait peur. Il avait peur que son chien se plaise dans d'autres bras, et l'abandonne, sans remords, comme les gens de son entourage semblaient tant aimer faire. Il avait peur qu'il tombe amoureux, qu'il ait envie de prendre soin d'une autre personne, de vivre avec elle. Il trouva alors la réponse de Jaehyun non cohérente. « Alors pourquoi... tu étais prêt à me quitter... il y a 2 secondes...? ». Il ne comprenait plus rien. L'homme avait-il bluffé ? La vision floutée par les larmes, le châtain avait les yeux dans le vide et n'avait même plus le courage d'affronter le regard de son amant. « Ils ont quoi de mieux ces autres... ? Ils ont quoi de plus que moi...? Pourquoi je n'arrive pas à te contenter...? Pourquoi tu vas voir ailleurs...? ». Secouant la tête, il finit par se rallonger dans son lit, épuisé, et se recouvrit de nouveau entièrement de ses draps. Sa voix était alors étouffée. « Ils vont te charmer Jaehyun... Et t'arracher à moi... ». Eizo n'avait pas peur de cette histoire de femme imposée, que lui aussi allait devoir subir. Car il se doutait qu'elle ne servirait que de mère porteuse. Que s'il fallait, grâce à son statut, il l'évincerait. Mais ces autres, ces inconnus, il n'avait aucun pouvoir sur eux. Il ne pourrait pas protéger Jaehyun de leur envoûtement. Et cela lui était insupportable.

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