(flashback) back home //&mayuko

C’était une journée normale, une journée parmi tant d’autres; les cours, le boulot, la routine, comme à l’habitude. Rien de palpitant en vue, autrement dit, à part que c’était une soirée particulièrement tranquille et que, ce soir, il se voyait assigner les tâches les plus chiantes possibles. Remplir les tablettes de marchandise, refaire l’inventaire, confirmer des rendez-vous… bref, de la paperasse, si ce n’était du dernier client, parce qu’évidemment, il n’avait pu se pointer au garage que dix minutes avant l’heure de fermeture. Et puisque la journée fut peu productive, il se vit bien évidemment obligé de servir le client, sur quoi le patron lui laissa les clés du garage et lui dit de fermer une fois qu’il en aurait terminé avec le client. De toute façon, ce n’était qu’un boulot d’une quarantaine de minutes, rien de bien grave, disait-il en le laissant en plan, là, et lui, incapable de refuser. Qui était-il pour refuser de toute façon ? mieux valait ne pas tenter le diable et perdre son boulot pour un maudit trente minutes, qu’il aurait franchement préféré passer à relaxer, mais passons.

« y’a quelqu’un à la porte… » fit le client alors qu’il se glissait d’en dessous de sa voiture, essuyant ses mains complètement souillées sur son pantalon et haussant les épaules. « c’est fermé, j’m’en fous. » répondit-il avant de disparaître derrière le comptoir, attrapant une calculatrice et calculant les coûts total de la réparation, salissant à peu près tout sur son chemin au passage, détail insignifiant. « alooors, ça fait 50,000 ¥ » dit-il, impatient de le voir quitter les lieux et de pouvoir foutre le camp à son tour, jetant un regard vers la porte pour voir si le client y attendait toujours. Client ? Ça n’avait pas l’air d’un client, pensa-t-il, alors qu’il jetait un regard intrigué à la silhouette clairement féminine patientant dehors. Il se demanda si ce n’était pas kai, et cette pensée le fit bouger, laissant la machine au client le temps qu’il pait et se dirigeant vers la porte pour l’ouvrir. Ce n’était peut-être même pas celle qu’il pensait, mais laisser une dame dans le besoin, et dans un quartier peu fréquentable qui plus est, c’était juste impossible.

« c’est fermé m’dame, vous avez besoin d’aide ? » demanda-t-il aussitôt qu’il ouvrit la porte, mais se figeant sur place dès que son regard se posa vers son visage. Confus, il plissa les yeux, sans dire un mot de plus, son cœur sautant un bond face à la réalisation de la personne qui se trouvait devant lui. il prit quelques secondes pour réfléchir, se demandant s’il n’avait pas zappé un épisode, ou si ce n’était pas tout simplement un sosie mais… « quoi ? mais t’es super sonic ou quoi ? » dit-il simplement en clignant des yeux, incapable de formuler une meilleure question.

Il n'y avait absolument aucune raison d'être nerveuse. Absolument aucune. Elle allait simplement attendre qu'il finisse son chiffre de travail, rester sur le pas de la porte, le saluer normalement lorsqu'il allait ouvrir et il n'y allait avoir aucun problème, aucune conséquence de nature négative, rien, rien, rien. Tout du moins c'est ce dont elle essayait de se convaincre, retenant mollement la laisse de son great pyrenees, Ryuko, le laissant renifler chaque arbre, chaque lampadaire, perdue dans ses pensées et se rongeant pratiquement les ongles de sa main libre. Elle savait qu'elle allait arriver après la fermeture, si elle continuait comme ça, mais elle ne pouvait s'empêcher de souhaiter qu'elle arriverait trop tard, pour retarder encore un peu sa réunion avec celui qu'elle considérait son meilleur ami. Ce n'était pas qu'ils étaient en dispute, loin de là, mais... ce n'était pas spécialement facile de reprendre contact après quelques semaines de silence, en face à face, alors qu'elle était sensée être en Chine, présentement. Elle s'arrêta à un feu rouge, fixant le vide d'un regard vague, sursautant pratiquement quand son chien glissa son museau froid sous la paume de sa main, et elle lui accorda une caresse avant de se secouer, rafermissant la prise sur la laisse et marchant un peu plus rapidement, malgré son hésitation toujours très présente. Elle n'allait quand même pas laisser les excuses pitoyables qu'elle s'était faites l'empêcher de prendre contact avec la seule personne sur laquelle elle croyait encore pouvoir compter maintenant qu'elle n'avait plus l'argent de ses parents derrière elle.

Elle laissa Ryuko vagabonder un peu autours de la porte de garage, peu inquiète pour lui, et s'arrêta devant la porte d'un air un peu confus. Et maintenant ? Elle jeta un oeil aux heures d'ouverture et, en effet, elle était pratiquement trois quart d'heure en retard sur l'heure de fermeture. Elle pencha la tête et plissa les yeux, voyant bien que le garage n'était par contre toujours pas vide, et il y avait du mouvement. Elle ne croyait pas vraiment en sa chance, alors elle se doutait bien que la personne n'allait pas être celle qu'elle souhaitait voir, mais elle se fit quand même patiente, espérant tout de même pouvoir avoir au moins une information sur celui qu'elle cherchait. Elle se redressa alors qu'elle entendit le bruit mécanique de la porte, et eut pratiquement un mouvement de recul en se retrouvant face à face à lui. Eh bien, peut-être devait-elle croire en sa chance un peu plus, désormais. « super sonic ? » balbutia-t-elle, son air de nouveau confus, jetant un oeil par dessus son épaule pour voir un homme qui devait probablement être un client. Dérangeait-elle ? « bonjour à toi aussi... je peux attendre si ça pose problème. » Elle haussa une épaule et tappa légèrement sa propre cuisse pour attirer l'attention du canin qui commençait à s'éloigner. « je croyais que tu serais partit à cette heure. »

Il était sans mots, tout simplement. Elle lui parlait comme si de rien n’était, comme s’ils s’étaient vus dans un café la veille et qu’elle n’était jamais partie.. pendant deux ans. Deux ans dans un pays étranger, où leurs seuls contacts n’avaient pu être que par messages et longues distances, vidéos et tout le reste, rien de suffisant pour ne pas dire qu’elle lui avait manqué. Énormément, même, mais là, il n’avait même pas le temps d’y réfléchir. Entre le rêve et la réalité, l’absurde et l’impossible, il ne comprenait plus trop où il se situait. « tu- » débuta-t-il, avant d’entendre le son de la clochette posée sur le bureau d’accueil, le client qui soupirait et s’impatientait. « il va me faire chier jusqu’à la fin lui. » marmonna-t-il, faisant volteface pour se diriger vers lui, attraper la machine, le reçu et, enfin, les clés de sa voiture. Il les lui fourra dans les mains, lui souhaita une bonne soirée et lui fit signe de disposer, tapant presque du pied en l’observant grimper dans sa bagnole et quitter les lieux, se faisant un plaisir de refermer la lourde porte une fois qu’il eut fait signe à la plus jeune d’entrer à l’intérieur, clignant des yeux à la vue du chien. Du temps avait passé, visiblement.

« tu croyais que je serais parti à cette heure ? » demanda-t-il, d’un ton outré, levant les bras en l’air, la fixant d’un air ahuri à présent. Il secoua la tête et se dirigea vers le fond du garage, attrapant les outils qui trainaient ci et là, le choc de la venue soudaine de mayuko pas suffisant pour lui donner envie de rester plus longtemps dans cet endroit de malheur. Quand même. « c’est tout ce que t’as à me dire ? tu croyais que je serais parti ? attends un peu que j’te rafraichisse la mémoire… » il pivota, marchant de reculons pour la fixer, la pointant avec sa clé à molette. Il allait devenir hystérique, son pauvre cœur ne tiendrait pas le coup avec celle-là, c’était définitif.

« tu étais en CHINE y’a deux jours. qu'est-ce-qu’il-se-passe ? » il s’arrêta juste après avoir prononcé ces mots, plissant les yeux. Elle ne lui avait rien dit. Elle était là, devant lui – oui, il commençait juste à le comprendre, à l’avaler – et jamais, ô grand jamais elle ne lui avait parlé de revenir au japon si tôt. Pourquoi, d’ailleurs ? « pitié, me dit pas que t’as été expulsée du pays ou une merde du genre. » il secoua la tête cette fois, espérant ne pas l’entendre lui raconter une histoire rocambolesque qui l’achèverait définitivement, pour de bon cette fois.

Son visage exprimait si facilement ce qui lui passait par la tête qu'elle sentait le rouge lui monter au nez, et elle lui offrit un petit sourire, semi-désolé et semi-nerveux, alors qu'il tournait sur les talons pour aller terminer la transaction avec le client impatient qui n'avait visiblement pas envie d'attendre à la fin de leurs retrouvailles pour se faire servir. Elle observa en silence, près de la porte du garage, pour ne pas être dans son chemin, et elle ne savait pas trop que penser du départ rapide de l'homme. Elle n'était pas vraiment à l'aise devant un inconnu, surtout que le sujet était légèrement délicat comme elle pouvait le constater maintenant qu'ils étaient seuls. Elle retroussa le nez alors qu'il la pointait d'un quelconque outil qu'elle ne prit pas la peine d'identifier, penchant la tête alors qu'il ramassait ce qui traînait ça et là, visiblement pressé de quitter son lieu de travail, ce qu'elle comprennait parfaitement vu l'heure actuelle. Elle eut la décence de détourner les yeux quand il la réprimanda, et se mordilla la lèvre en hésitant. Le terrain était déjà plutôt glissant, alors qu'elle devait déjà s'expliquer sur ce qui s'était dernièrement passé, et elle même avait un peu du mal à remettre tous les évènements en ordre dans sa tête. « je n'ai pas été expulsée du pays, vraiment, tu crois que je suis si terrible ? » elle marmonna en s'agenouillant pour caresser la tête de son chien pour se distraire.

« ne t'énerve pas, okay ? J'avais vraiment l'intention de t'avertir, c'est juste... » elle lui jeta un regard presque piteux, haussant une épaule. C'était vraiment dans ses plans, vraiment, mais elle avait dû partir en vitesse. Elle avait eut largement le temps de trouver un appartement et de payer quelques mois d'avance pour ne pas être dans la merde, de s'assurer au moins cinq ans d'université, et même de trouver un boulot à distance, passer l'entrevue au téléphone. « je devais en faire rester là-bas quelques semaines de plus mais avec l'université qui commence bientôt j'avais la pression. » elle replaça une mèche derrière son oreille avant de se redresser, soupirant. Elle n'avait pas spécialement envie de se lancer dans cette discussion mais elle avait besoin de le lui dire, elle ne pouvait pas le lui cacher. Après tout, elle était là spécialement pour ça. Elle avait été jusqu'à chez sa mère, qui habitait toujours au même endroit, pour tenter de le retrouver. Après avoir appris qu'il avait déménagé et finalement eut l'adresse du garage, et elle avait prit son courage à deux mains pour se pointer le nez. « je suis arrivée hier soir, j'ai pas de cellulaire ni de pc... c'est ta mère qui m'a donné l'adresse d'ici. »    

il ne comprenait pas. pas du tout. elle avait donc décidé de quitter le confort du foyer, de la famille, de la richesse et la bonté pour revenir s’installer au japon, comme ça, toute seule, et elle lui demandait de rester zen face à tout ça. il s’arrêta dans sa lancée et ouvrit la bouche, s’apprêtant à parler, mais il finit par simplement lever un doigt et secouer la tête. Il préféra réfléchir un peu à tout ça, tout compte fait, et pivota à nouveau pour se rendre jusqu’à son casier, déboutonnant son uniforme one piece et le laissant pendre à sa taille, étalant toujours la crasse un peu partout chaque fois qu’il touchait un nouveau truc. Il se figea à nouveau lorsqu’il l’entendit parler de sa mère, ses épaules retombant un peu lourdement. Il n’y avait pas raison, mais il espérait bien que sa vieille ne s’inquiéterait pas pour rien, tout de même. Lentement, il tourna la tête, la regardant du coin de l’œil, par-dessus l’épaule.

« je suis pas énervé. » répondit-il, marquant une pause, retroussant les lèvres. Ce n’était qu’à moitié faux, il n’était pas – réellement – énervé, mais il y était presque. En vérité, il était surtout froissé à l’idée qu’elle ne lui en ait même pas parlé. Il aurait pu aller la chercher à l’aéroport, s’assurer que tout se passe en douceur, l’aider à s’établir ou quoi… mais non, elle avait tout fait de son propre chef, et peut-être même qu’elle l’avait fait sur un coup de tête, tiens. Il en savait rien, au fond, c’était un peu difficile de mettre le puzzle en ordre avec le peu d’information qu’il avait et, surtout, il était toujours sous le choc. Il le serait probablement pour la prochaine heure au moins, d’ailleurs. « donc laisse-moi faire un récapitulatif là… tu es revenue au japon, seule qui plus est j’en déduis, et probablement sans l’accord de tes darons – ce qui en fait officiellement une fugue, et tu n’as même pas eu le temps de m’avertir que tu achetais les billets ? me préparer mentalement plutôt que me faire faire une crise cardiaque ? non ? rien du tout ? tu sais que je te hais ? » plus il parlait, plus sa voix cassait. Le roi du drame, par moments, mais pour le coup, il ne se sentait pas à blâmer, franchement.

« alors là, tu vas venir chez moi, on va discuter et trouver un moyen d’arranger cette situation. » dit-il, comme s’il était déjà convaincu qu’elle avait fait un choix fatalement mauvais. Probablement le cas, d’ailleurs. Il rangea quelques trucs de plus, se débarrassa de son jumpsuit et le fourra dans son casier avant d’en refermer la porte, attrapant un linge propre pour s’essuyer les mains au mieux possible. Normalement, il aurait pris le temps d’utiliser les douches du garage, mais là, il n’avait qu’une envie et c’était de foutre le camp d’ici. d’avoir des explications, ailleurs que sous les affreux néons, que cette pièce empestant l’huile, la graisse et la peinture en aérosol. « y’a un truc que tu me dis pas. t'es enceinte, t’as tué un chinois, je sais pas… » il ferma les lumières, une à une, puis vint enfin se poster droit devant elle, la fixant, la jugeant même.

Son regard était fixé sur lui durant toute la durée de son monologue, et elle se sentait de plus en plus nerveuse, ses bras se croisant et se décroisant avec une sorte d'angoisse naissante. Elle savait bien qu'il n'allait pas le prendre à la légère, mais c'était exactement ce dont elle s'était inquiété, qu'il soit fâché contre elle. Mais elle n'avait vraiment pas pû l'avertir, elle n'avait pas prévu le faire avant le dernier moment possible et ses plans avaient été précipité par la tension qui régnait à la maison avant son départ, par la pression que son père lui mettait sur les épaules pour se trouver une université d'excellence pour avoir des cours digne de ce nom, et elle n'était pas du tout d'accord avec ce qu'ils attendaient d'elle. Et ils n'étaient pas du tout d'accord avec ce qu'elle désirait, ce qui l'avait poussé à boucler bagages beaucoup plus vite que prévu. Elle évita son regard et retroussa légèrement le nez, lui jetant un regard un peu vide alors qu'il semblait beaucoup plus inquiet pour son futur qu'elle-même, ce qui était compréhensible puisqu'il ne savait sans doute pas qu'elle avait en fait tout prévu, de A à Z, enfin... tout sauf le délai raccourci de son déménagement express et, en effet, sous le nez de ses parents qui n'avaient encore aucune idée de l'endroit qu'elle avait rejoint après son départ plutôt rapide de la demeure familiale. « je comptais vraiment te le dire... » geigna-t-elle en baissant les épaules, lui jetant un regard piteux « je ne voulais pas que tu t'inquiètes et que tu essaies de me faire changer d'avis, alors je comptais te le dire juste avant de partir mais... j'suis partie en urgence. »

Elle tapota la tête du chien qui commençait à s'impatienter à ses pieds, piétinant sur place, et jeta un oeil vers l'extérieur du garage. C'était sans doute une bonne idée de quitter les lieux pour s'installer plus confortablement, car elle sentait que la conversation allait être plutôt longue, et qu'elle en aurait beaucoup à dire pour qu'il ne s'inquiéte pas trop pour elle. Même si elle doutait fortement qu'il cesse de s'inquiéter un jour, monsieur coeur d'or qu'il était, tout du moins avec elle. Pratiquement mère poule. « et je ne suis pas enceinte, je t'en aurais parlé bien plus tôt si c'était le cas. Je te jure que je n'ai rien fait d'illégal, dangereux ou inconscient. » Elle osa un petit sourire hésitant, attrapant la laisse de Ryuko en vue de leur sortie prochaine. « mais tu as raison... je crois qu'on doit parler. Mais je n'ai pas besoin "d'arranger la situation", vraiment... tout va bien. »

il avait préféré ne rien dire suite à ses mots, mais il ne s’était tout de même pas privé de lui lancer un dernier regard suspect, les yeux plissés et le nez froncé alors qu’il lui faisait signe de patienter quelques minutes, le temps de se laver les mains et se changer aussi. Il n’avait pas la voiture la plus récente, ni la plus jolie, mais il tenait tout de même à la garer un – minimum – propre. Bientôt, il disparut, quelque part derrière le bazar d’articles automobiles en tout genre, puis se dépêcha de nettoyer ses mains, son visage, et d’enfiler des vêtements propres. L’air toujours peu rassuré, il revint vers elle, lui jetant un regard et lui faisant signe de le suivre à l’extérieur, ses clés se balançant, accrochées à ses doigts. Il lui ouvrit la porte, activa le système d’alarme, puis quitta le garage à son tour, prenant un instant pour reporter son attention vers le chien.

Gros chien.
Énorme chien.

Allait-il seulement entrer dans sa voiture ? avant même de s’y tenter, il tomba sur ses genoux devant le chien et l’attrapant pour le tirer vers lui, non sans effort, ébouriffant son pelage. C’était bien le chien qu’il pensait, deux ans plus tard et une bonne trentaine de kilos en plus. Une fois qu’il eut apprécié un moment de retrouvailles avec ledit chien, dont il ne connaissait pas le surnom au passage, il se redressa et attrapa sa laisse pour l’attirer vers la voiture. Franchement, son long silence n’était pas si étrange – heureusement que le chien fut présent, d’ailleurs, puisqu’il l’aida certainement à se calmer un peu la tête avant d’ouvrir à nouveau la bouche. Réussir à respirer, se calmer les idées, et enfin, être prêt à lui adresser la parole et faire les choses dans le bon ordre. Au fond, rien ne lui prouvait qu’elle avait fait une connerie – il était, surtout, insulté qu’elle ne lui en ait pas parlé auparavant. Parce que si elle y avait bien réfléchi, c’était qu’elle le savait depuis suffisamment longtemps pour – au moins – le lui dire. Autrement… il secoua la tête, glissant les clés dans la serrure et se tournant vers elle, glissant une main dans une poche de son jean, la laisse autour de son poignet, la fixant silencieusement un court moment.

« tu m’aides à faire rentrer ton cabot dans la bagnole ? » demanda-t-il, sur un ton plus détendu. Il avait mal réagit, il en était conscient. Au fond, il aurait dût être simplement heureux de la revoir. Le sérieux pouvait attendre une heure ou deux, sûrement. « et… » il grimaça, sautant à deux pieds sur son orgueil, levant le bras pour l’inviter à lui faire un câlin. « allez, viens là. » fit-il, roulant les yeux.  

Elle savait très bien que c'était favorable pour elle de ne pas tenter de pousser la discussion tant qu'il n'était pas prêt à cela, et le silence qui s'étirait longuement entre les deux n'en était pas moins inconfortable pour autant, tout du moins pour elle. Elle avait presque été soulagée de le voir disparaître pour se changer et se nettoyer un peu, et pour être tout à fait honnête, elle avait bien faillit prendre avantage de ce moment pour s'éclipser silencieusement. Mais elle n'était pas stupide, contrairement à ce que beaucoup aurait pu croire, et elle savait particulièrement bien que foutre le camps durant une telle discussion ne pouvait s'avérer que nocive pour leur relation actuelle, et ce n'était pas du tout ce qu'elle souhaitait. Elle avait besoin de lui, maintenant plus que jamais, pour être à ses côtés et ne pas la juger, ou du moins essayer de comprendre ses intentions et ses émotions avant de juger ses actions. Et c'était sans doute ce qu'il essayait de faire, se calmer après cette avalanche de révélations pour ne pas sauter aux conclusions directement, et elle lui en était reconnaissante, même si le stress qu'elle portait sur ses épaules depuis des mois maintenant commençait à se faire lourdement sentir. Elle voulait simplement tout d'abord s'assurer qu'il ne lui en voulait pas trop, qu'il n'allait pas lui tourner le dos, parce qu'elle savait bien qu'elle lui avait caché beaucoup de chose depuis un trop long moment, et qu'elle allait certainement se faire réprimander pour cette offense, mais elle était prête à en accepter les conséquences si cela lui permettait de ne pas le perdre.

Et donc elle garda la bouche close jusqu'à ce qu'il reprenne, se permettant par contre un sourire alors que le jeune homme s'agenouillait devant le chien qu'il n'avait pas vu depuis deux ans, alors qu'il n'était encore qu'un chiot à cette époque. La différence était tout de même assez énorme, maintenant qu'elle y pensait. Elle avait vu l'animal grandir, alors pour elle c'était naturel, mais lui n'avait eut que le bébé, puis tout d'un coup l'adulte. Cela devait être assez impressionnant. Elle le suivit alors qu'il menait le chien à sa voiture, et ses épaules se relâchèrent légèrement lorsqu'il lui demanda finalement de l'aide pour monter l'énorme canin dans le véhicule. Elle acquiesça sans hésiter, s'approchant plus près, et s'arrêtant quelques secondes en le regardant avec surprise alors qu'il ouvrait un bras dans un signe assez clair, l'invitant à se loger contre lui. Elle eut un moment d'incertitude, puis un intense soulagement lui fit relâcher l'entière tension qui l'emplissait, la faisant presque tomber au sol, et elle manqua de trébucher alors qu'elle se jetait pratiquement contre lui, ses bras entourant son cou, cachant son visage contre son épaule alors qu'elle reniflait piteusement, tentant vainement de chasser les larmes qui lui étaient montées aux yeux. C'était ridicule de sa part, au bord des larmes par simple soulagement, mais elle ne pouvait s'empêcher, l'angoisse des derniers mois s'évaporant lentement mais sûrement alors qu'elle savait qu'il ne lui en voulait pas. Ou tout du moins pas autant qu'elle ne l'avait craint pendant tout ce temps.« je pensais que tu allais me dire de partir. » murmura-t-elle en essayant de contrôler le tremblement de sa voix. « que tu n'allais plus me parler. » ajouta-t-elle en tentant de ne pas trop sonner aussi pitoyable qu'elle se sentait. « j'ai été une amie terrible, je suis désolée de n'avoir rien dit, je ne voulais pas que tu t'inquiètes. »  

Il l’avait d’abord vue hésiter, presque chancelante sur place, comme si elle s’était plutôt attendue à ce qu’il lui crie dessus plutôt que de l’inviter à venir dans ses bras. Pendant un moment, il se demanda même s’il n’avait pas juste l’air d’un idiot sur le point de se prendre un râteau, attendant comme un con qu’elle vienne le rejoindre, alors que, peut-être, elle n’avait pas du tout apprécié son comportement. Ce qui, en soit, n’aurait pas été tellement surprenant, puisqu’il avait cette mauvaise tendance à toujours décevoir les gens, ceux qu’il affectionnait le plus tout particulièrement. Mais le soulagement vint rapidement, et il la vit s’approcher, trottiner presque jusqu’à lui. Bientôt, il la sentit se blottir conte lui, et son cœur se serra. La laisse au poignet, ses bras encerclèrent la délicate silhouette de la jeune femme, la serrant cotre lui et fermant même les yeux en guise de soulagement, comme si la sentir, la toucher était suffisant pour lui faire assimiler au moins une chose. Elle était en vie, et en sécurité, au moins pour le tems qu’elle restait avec lui. Peu importe ce qui avait pu se passer, ce qu’il allait apprendre par la suite, elle était là, avec lui, en chair et en os son cœur se serra à nouveau, cependant, et pas pour les mêmes raisons, lorsqu’il l’entendit renifler contre son épaule. Et bien, être petit avait ses avantages, pensa-t-il brièvement, tentant malgré tout de ne pas se ronger d’inquiétude.

« hé, mon ange… » fit-il, s’écartant juste assez d’elle pour pouvoir observer son visage, ses mains entourant son visage et ses pouces passant délicatement sous ses yeux maintenant remplis de larmes, prêtes à couler à tout moment. « pleure pas comme ça, je suis là. » dit-il simplement, même s’il savait que ce n’était pas nécessairement facile de le retenir. Elle n’avait même pas besoin de les retenir, à vrai dire – mais ça lui brisait le cœur, tout simplement. Elle avait certainement dut en subir, des épreuves, pour en être ici aujourd’hui. Il inclina la tête et vint poser un baiser sur son front, la gardant toujours tout contre lui, une de ses mains caressant à présent ses cheveux. Mayuko était comme de la famille, et il s’était toujours promis d’en prendre encore plus soins qu’il n’en prenait pour lui-même. De loin, d’ailleurs.

« désolé, je te dirais jamais de foutre le camp comme ça. je préfère encore te garder illégalement dans mon placard que te dire de dégager. » dit-il d’un ton plus léger avant de s’écarter de nouveau, l’observant silencieusement un moment avant d’être distrait par le canin qui commençait certainement à s’impatienter. Vrai qu’il n’y avait rien de bien intéressant dans le coin pour un chien… « allez… ton cabot a hâte d’arriver à la maison. » ajouta-t-il cette fois, insinuant volontairement par le même fait que chez lui, c’était comme chez elle, comme depuis toujours d’ailleurs. Ceci dit, il lui fit signe d’entrer dans la voiture, conscient que ce n’était pas le meilleur quartier pour se faire voir lorsqu’on était une jolie jeune femme. Heureusement que le chien l’accompagnait, pensa-t-il bêtement, parce qu’il n’osait pas imaginer quel genre de type aurait pu l’aborder. D’ailleurs, son regard se posa sur l’un d’entre eux au loin, et il leva le menton en signe d’affront en le voyant fixer un peu trop intensément la plus jeune, ce qui le poussa à ouvrir la portière pour elle. « entre, y’a des gens louches dans le coin. » fit-il, son regard, sévère, ne lâchant pas une seconde l’inconnu.

C'était presque difficile d'accepter qu'il ne lui en voulait pas plus que ça. Elle aurait presque été soulagée qu'il lui hurle dessus, parce que la culpabilité qu'elle ressentait était lourde sur ses épaules. Et bien que ses mots l'allégeait lentement mais sûrement, elle avait du mal à imaginer que cela pouvait être aussi facile, qu'elle n'avait pas à supplier pour son pardon ou quelque chose dans le genre. Même si en réalité elle ne savait pas trop comment cela pouvait être possible, connaissant son ami. Il avait toujours eut le coeur sur la main, et sa porte avait toujours été ouverte pour elle, même lorsqu'elle arrivait comme un cheveu sur la soupe, et elle en avait toujours été infiniement reconnaissante. Mais elle savait que cette fois c'était bien pire que de ne pas prévenir avant de se ramener, c'était pire que de ne pas donner de nouvelle pendant quelques jours puis de revenir sans rien expliquer, et elle s'en voulait, bien sûr, même si ses raisons étaient logiques et que même si elle devait recommencer, elle ferait exactement la même chose. Elle avait tout bien planifié, depuis des mois, et elle se doutait bien que de dire à son meilleur ami qu'elle comptait fuguer n'était pas une bonne idée. Lui qui voulait toujours s'assurer qu'elle soit en sécurité et qu'elle n'ait aucun problème, il s'y serait opposé, sûrement. Ou bien aurait chambouler ses plans de manière irrécupérable et elle ne voulait pas de ça.

Elle le laissa passer ses pouces sous ses yeux, et elle tenta désespérément de ne pas laisser les larmes couler, prenant de grande respiration silencieuse pour se calmer. Ses émotions étaient vraiment trop à fleur de peau, et elle avait du mal à les contrôler, ce qui n'était pas particulièrement chose rare maintenant qu'elle y pensait, mais elle n'avait pas l'habitude de pleurer devant les gens. Ce n'était pas n'importe qui, mais elle savait très bien qu'il ne serait pas très heureux de la voir pleurer, et elle ne voulait pas l'attrister, pas lorsqu'il s'agissait de larmes de soulagement et non pas de chagrin. Elle renifla de nouveau et relâcha sa prise sur lui pour se frotter les yeux, chassant l'eau qui s'y était accumulée, sachant qu'elle n'aurait pas à trop s'inquiéter après cette première vague impossible à retenir. Elle prit un moment pour se reprendre, rassurée encore une fois par ses paroles accueillantes, acquiesçant même un sourire alors qu'il parlait de la garder illégalement dans son placard. C'était presque mignon. « Je retiens l'offre du placard si jamais j'arrive pas à payer mon appartement. »

L'impatience de Ryuko se fit rapidement sentir, lorsqu'il commença à avoir la bougeotte et à tirer sur sa laisse, que le jeune homme avait toujours en main, et elle hocha la tête quand il mentionna qu'ils devraient reporter la conversation dans un autre lieu, et elle suivit son regard lorsqu'il se mit à fixer quelque chose plus loin, mais elle n'eut pas le temps de voir ce que c'était lorsqu'il ouvrit la portière, attirant son attention, et elle se glissa dans le véhicule, refermant la portière derrière elle et se retourna vers l'arrière du véhicule, tappant fermement le banc alors que Ryusei ouvrait la porte pour que le chien monte, faisant signe au canin de ne pas faire d'histoire et de se tenir tranquille. Le chien grimpa tant bien que mal sur le banc et s'y coucha à moitié, prenant l'entièreté de la banquette arrière. « Il n'aime pas le coin non plus, je crois. Il grognait sur tous ceux qu'on croisait pendant que je marchais pour trouver le garage. » mentionna-t-elle alors que le jeune homme prenait place sur le banc du conducteur. « J'ai eut de la chance que tu sois encore au boulot... » ajouta-t-elle en observant les alentours qui s'étaient assombris, et les ombres qui bougeaient dans les coins, fugaces silhouettes qui disparaîssaient si elle regardait en leur direction. « Ta mère m'a dit que tu avais déménagé ? Tu ne m'avais pas mentionné ça au téléphone. Tu vis dans ce coin ? »

Il avait levé la tête en l’entendant parler de ne pas être capable de payer le loyer du logement, les lèvres pincées, l’air de lui dire tais-toi idiote. et c’était à peu près ce que ça voulait dire, aussi. Il préférait ne pas s’inquiéter à ce sujet, surtout qu’ils n’avaient même pas parlé dudit logement encore… elle s’était trouvé un logement, comme ça, vraiment ? merde. Il devait penser à autre chose, pousser ces questions à un peu plus tard, tenter de ne pas s’inquiéter au moins jusqu’à ce qu’il sache le fond de l’histoire. C’était déjà un départ. Il prit place à l’intérieur du véhicule et mit les clés dans le contact, refermant la portière et soupirant un coup en voyant le canin prendre à peu près toute la banquette au travers du rétroviseur. Il espérait vraiment qu’il n’était pas trop agité en voiture, parce que la sienne n’était pas tellement spacieuse à bien y penser, ou bien peut-être était-ce la taille du chien qui lui donnait cette impression d’un coup… dans tous les cas,  s’il commençait à s’agiter, il n’était pas totalement certain d’arriver à garder toute sa concentration sur la route. Et à cette heure-là, valait mieux. « il fait bien son boulot alors. » dit-il alors qu’il faisait tourner le moteur, s’engageant hors du minuscule stationnement pour se diriger vers shinjuku le plus rapidement possible. D’une pour éviter de passer trop de temps en voiture avec l’énorme bête échouée à l’arrière, et de deux, parce qu’il avait tout simplement hâte de quitter le quartier, comme chaque fois qu’il sortait du boulot, finalement.

« non, non. shinjuku. » répondit-il à sa dernière question, rigolant presque, mais se contentant d’un sourire amusé, malgré tout le reste. Les choses avaient beaucoup changées depuis qu’elle était partie, certaines plus positives, et d’autres moins. mais la seule chose réellement différente, c’était ça – il avait quitté le foyer familial, malgré lui, espérant que sa mère se débrouille mieux sans une deuxième bouche à nourrir. « j’ai un logement et euh… un colocataire depuis peu. » il pinça les lèvres, inclina la tête, hésitant un long moment avant de lui dire ce qu’il en était réellement. Il s’attendait bien évidement à des questions, mais surtout, à des moqueries de tous les genres. « une… une colocataire, en fait. » marmonna-t-il, observant des deux côtés de la route et appuyant sur la radio, comme si ça pouvait taire toutes ses questions pour au moins quelques secondes. C’était plutôt étrange qu’il ne lui en ait pas touché un mot, vu comme ça… mais en vérité, au départ, il n’avait pas cru important de le lui dire puisqu’elle n’était plus ici, avec lui. en quoi ça aurait pu l’affecter ? s’il avait su, il aurait pu l’avertir, plutôt que de la faire marcher jusqu’ici, dans le noir, qui plus est.

« oui, c’est une fille. non, j’ai – pas – couché avec elle. et donc par le fait même, non, c’est pas ma copine. » il énuméra toutes les questions possibles avant même qu’elle ne les pose, préférant clore le sujet au plus vite, avant même qu’elle ne s’y engage. Ça, il lui en aurait forcément parlé. Il profita d’une lumière rouge pour se pencher vers elle, figeant son regard vers son visage et la pointant d’un doigt, presque d’un air défiant. « et non, je pense pas qu’elle soit gaie. » ajouta-t-il, parce que la dernière chose qu’il voulait savoir, c’était ça, dans son appartement. Et oui, la colocataire était plutôt jolie – et il ne doutait pas qu’elle en penserait de même elle aussi.

Elle devait s'admettre  rassurée lorsqu'il indiqua le quartier qu'il habitait, ne souhaitant pas réellement passer plus de temps que nécessaire dans ce genre d'endroit, même si elle n'aurait pas protestée si cela avait été le cas, bien entendu. Ce n'était pas son genre de se plaindre pour si peu, et de toute façon, cela pouvait sembler ridicule, mais elle avait une confiance absolue en lui et en sa capacité à la protéger, peu importe le genre de problème lui tombant dessus. Non pas qu'elle ait nécessairement besoin ou envie qu'il ne le fasse, mais c'était toujours le cas de toute façon, alors elle s'y était habituée. Les yeux fixés sur la route, elle ignorait le chien qui commençait à s'agiter en arrière, remuant et se déplaçant en rampant à demi sur la banquette. Elle avait à peine humer en signe d'écoute lorsqu'il avait admis avoir un colocataire, mais elle s'était redressée légèrement en l'entendant spécifier qu'il s'agissait en fait d'-une- colocataire. Une, comme dans femme, fille, femelle. Il vivait avec une fille ? Pourquoi n'était-elle pas déjà au courant ? Bon, cela semblait être assez récent, et elle n'avait pas été spécialement disponible dans les derniers jours, mais ce n'était pas comme s'ils ne s'étaient pas parlé du tout les dernières semaines ! Elle l'avait même accroché entre son chiffre de travail et sa courte période de sommeil à peine deux jours auparavant. Il aurait pu au moins l'avertir ! Bon, elle n'était sans doute pas mieux, loin de là, elle devait l'admettre, mais ce n'était pas pour autant qu'elle n'était pas un tout petit peu vexée. Et en plus une fille, le connaissant, il avait peut-être déjà passé à l'acte, ou bien ils vivaient ensemble justement parce que c'était sa copine ! Et si ça l'était, elle allait simplement tout à coups se retrouver dans leur nid d'amour. Son nez se retroussa dans une légère grimace de dégoût, et elle tourna la tête vers lui.

Mais encore une fois, il répondit à ses questions avant même qu'elle ne puisse ouvrir la bouche.

Ses épaules un peu tendues se rabaissèrent, lorsqu'elle comprit que ce n'était pas du tout ce qu'elle avait en tête, même si c'était quand même plutôt étrange qu'un garçon et une fille vivent ensemble sans la moindre attirance, et là encore, il la prit de vitesse alors qu'il ajoutait qu'elle n'était sans doute pas gaie. Elle mima un air déconfit et lui donna un léger coup de coude, roulant des yeux alors que Ryuko s'agitait un peu plus à l'arrière, lâchant un jappement presque amusé. « Alors il n'y a vraiment rien entre vous ? » Pressa-t-elle même si elle avait déjà reçue la réponse, voulant mettre au clair les doutes qu'elle avait encore à ce sujet. Elle repoussa la tête de Ryuko vers l'arrière alors qu'il poussait son museau contre son bras, tentant de faufiler son crâne entre les sièges avant. « Elle est jolie ? » Demanda-t-elle finalement, un petit sourire au coins des lèvres, la conversation prenant une tournure qu'elle connaissait un peu mieux entre eux, quelque chose de plutôt naturel, de commenter les filles de leur entourage respectif. « Tu as peur que j'essaie de me taper ta coloc' ou je me trompe ? » Elle secoua la tête, repoussant encore une fois le museau du chien alors que ce dernier tentait avec détermination de lécher la joue de Ryusei, probablement avide de jouer avec le nouveau venu qui semblait si bien s'entendre avec sa maîtresse. Mayuko siffla légèrement entre ses dents pour ramener le chien à l'ordre, ne voulant pas que l'animal ne soit une trop grosse distraction pour le conducteur, mais le canin avait déjà réussit à glisser une patte entre les bancs, s'y appuyant pour essayer de gagner l'avant du véhicule, même si c'était ridiculement impossible pour l'énorme bête de faire cela. « Mais.... ! Ryu ! Couché ! Ce n'est pas le temps de jouer ! » ordonna-t-elle au chien d'une voix ferme, le repoussant de nouveau vers l'arrière, le cabot lâchant un gémissement de déception en se recalant contre la banquette.

Alors il n’y a vraiment rien entre vous ? un sourire amusé vint inévitablement flotter sur ses lèvres. Il avait anticipé ses questions avant même qu’elle n’y pense, parce que c’était évident qu’elle allait les lui poser. Puis elle enchaîna, lui demandant si elle était jolie. L’air amusé se dissipa et il pencha légèrement la tête, réfléchissant, fixant la route attentivement. Bien sûr qu’elle était jolie ; elle était carrément sexy, mais ça, il ne pouvait pas le dire. D’une parce qu’il ne se permettait de la voir autrement que comme une colocataire et de deux parce que, bon sang, c’était mayuko avec lui. il n’avait pas du tout, mais alors du tout envie d’imaginer ce – qu’elle – pouvait bien penser s’il lui disait qu’elle l’était. Et juste comme il pensait à ça, voilà qu’elle lui demandait s’il avait peur qu’elle veule se la taper, et il rigola, franchement cette fois, secouant la tête et soupirant. C’était réciproque. Il ne pouvait rien lui cacher.

« ouais. elle est jolie. mais c’est… » il secoua à nouveau la tête, mais cette fois, c’était pour autre chose. L’haleine familière d’un canin, puis l’horrible feeling de sa langue qui s’écrasait sur sa joue, laissant une trainée de bave sur son passage. Il arrêta presque de respirer sur le coup, surpris, ayant presque oublié la présence du chien sur la banquette arrière jusque-là. Il fronça les sourcils, puis le nez, et finalement, il grimaça, histoire d’exprimer le dégoût qu’il ressentait face à la bave qui lui séchait à présent dans le visage. Ryu ! Couché ! à ces mots, le blond entrouvrit la bouche, l’air carrément outré. Qu’est-ce qu’elle venait de dire, là, l’autre ? il profita d’une lumière rouge pour figer son regard vers elle, toujours cet air insulté au visage. « j’suis confus là, tu viens de m’ordonner de me coucher ou t’as confondu ton clébard pour ma magnifique personne ? » demanda-t-il, exigeant des réponses claires, visiblement. Il se râcla cependant la gorge pour poursuivre sa première tentative.

« elle est jolie, mais c’est hors de portée. » conclut-il enfin avant de redémarrer, tournant finalement dans une rue menant à son appartement, s’engageant dans le quartier plus résidentiel de shinjuku. À cette heure, ça grouillait encore de jeunes de tous les genres ; des punks, des drogués, des gens saouls, des hipsters qui marchaient vers le quartier in, bref, la routine. « j’suis dégueulasse à cause de ton machin énorme ! tu m’laves la gueule en arrivant, c’est pas possible, j’ai une image à maintenir, tous ces microbes quoi. » ajouta-t-il, d’un ton plus dramatique. Évidemment qu’il avait une image à maintenir, mais il n’était pas à ça de près. Il voulait simplement l’emmerder, parce qu’elle l’emmerdait elle aussi, et au fond, parler de sa coloc sexy (ou pas), ça ne le rendait pas tellement à l’aise. y’avait pleins d’autres trucs à se raconter, il en était plutôt certain. D’ailleurs, ils arrivaient presque à la maison. Soulagement.  

Elle était relativement occupée à faussement bougonner pour contrer son rire, sachant très bien ce qu'il pensait, et sachant très bien qu'il savait pertinamment toutes les questions qu'elle aurait pu poser d'avance. Ils se connaissaient décidément beaucoup trop bien l'un l'autre, même si la distance avait sembler allourdir leur relation pendant un court moment, de sa faute bien évidemment, puisqu'elle devait admettre qu'elle avait été plutôt superficielle dans leur discussion lors de la préparation de sa fugue. Mais elle avait pris bien soins de lui raconter absolument tout ce qui n'était lié à ça de près ou de loin, mais faire le tri avait parfois été difficile, et elle avait manquer de s'auto-saboter plusieurs fois. Mais garder une façade normale lorsqu'on prévoyait quelque chose d'aussi gros.. ce n'était pas des plus aisés. Pas plus que de cavaler subtilement hors du pays. Elle secoua la tête et arqua un sourcil surpris lorsqu'il prit un air insulté, et elle fut laissé confuse pendant quelques secondes avant qu'il remette en question ses paroles, et elle le fixa pendant un bon moment comme s'il était totalement désaxé, puis éclata de rire, ignorant les paroles qui suivirent pour s'occuper du chien qui tentait encore de revenir vers l'avant en l'entandant rigoler. Elle l'empêcha de repasser sa langue sur le visage de son ami alors qu'elle avait du mal à calmer son rire, secouant la tête pour essayer de se ressaisir avant qu'il ne la prenne pour une folle. « Eh ! » elle le frappa à l'épaule en se redressant sur son banc, sifflant entre ses dents pour que le chien se recouche sagement sur la banquette arrière. « Ryu n'est pas un gros machin, ni un clébard, c'est un great pyrenees de race, okay ? » Elle repoussa ses cheveux derrière son oreille dignement, tapotant le crâne de son chien affectueusement alors qu'elle fixait la rue, se demandant si son ami se dirigeait directement vers chez lui, ou s'il avait décidé de déambuler dans les rues comme un perdu.

« Et je n'ai confondu personne, ce n'est pas ma faute si vous avez le même surnom. Enfin si, en quelque sorte ma faute mais bon. » Elle devait admettre qu'elle n'avait jamais osé lui avouer le nom du chien à cause de la provenance du nom. Elle n'avait jamais eut envie de garder le nom fade que son père avait tenté de lui donner, et avait choisit elle-même, même si c'était tout compte fait ridicule comme nom. En plus d'être un nom féminin, initialement, mais elle n'avait pu s'en empêcher. « Il se nomme Ryuko. » dit-elle avait une nonchalance forcée, espérant fortement qu'il ne fasse pas le lien. Mais elle savait bien qu'il allait finir par s'en douter, après tout, il n'était certainement pas stupide, et il la connaissait suffisament bien pour savoir que le hasard ne faisait généralement pas partie de sa vie, surtout lorsqu'il s'agissait de choix réfléchit. « Je ne suis pas ta mère, tu te laveras le visage seul, merci bien. Ce n'est pas ma faute si Ryu a décidé de te montrer son affection aussi rapidement. » Elle roula des yeux et fouilla dans son petit sac à main pour en sortir un mouchoir, le passant sur son visage pour enlever un peu de l'épaisse couche de salive laissée par son animal. « J'avoue qu'il ne s'est pas retenu, uh.. » laissa-t-elle tomber avec un petit sourire mal caché.

Impatient de se débarrasser de la maudite bave du chien, il tendit la joue vers elle, crispé, mais docile puisqu’elle avait au moins pris la peine de lui essuyer la joue. C’était répugnant, pour être honnête, mais il était déjà sale de toute façon. Peu importe. Il soupira à ses mots, l’imitant silencieusement alors qu’elle lui expliquait que ce n’était ni un clébard, ni un gros machin, et tous ces sermons auxquels il aurait franchement dut s’attendre. Voilà même pas une heure qu’elle était avec lui, et elle se plaignait déjà. Le fait était que, lui n’était pas mieux, mais ça… c’était toujours une autre histoire, évidemment. Curieux, il haussa un sourcil lorsqu’elle mentionna le nom complet du chien. Il lui jeta un regard intrigué, perplexe même, mais ne dit rien pour le moment, se contentant de se rendre jusqu’à l’appartement et de se stationner, s’affairant avec toute la lenteur du monde à détacher sa ceinture et pivotant sur son siège, appuyant sa tête contre ledit siège et la fixant avec des yeux plissés.

« c’est plutôt marrant, comme nom, non ? » demanda-t-il, d’un ton suspect. Mais il ne s’attendait à aucune réponse, en vérité. Il se jouait d’elle, parce qu’il avait beau faire l’idiot et être carrément stupide, parfois, il n’était pas con. Pas tant que ça, au moins… pas au point de ne pas réaliser un jeu de mot, si évident pourtant. Il humecta ses lèvres, haussa les sourcils, puis jeta un regard vers les appartements devant eux. Il lui fit signe de tête, puis détacha sa ceinture à elle aussi, coupant le contact et ouvrant la portière. « c’est pas un château, mais bienvenue à la maison. » dit-il en roulant des yeux pour une énième fois, se glissant hors du véhicule et le contournant pour ouvrir la porte au chien, qui se fit un – plaisir – de sortir lui aussi, lui filant entre les jambes, sa main saisissant la laisse juste à temps. Il n’était pas certain que ce chien était réellement censé être d’un tempérament hyperactif, mais pour le coup, il espérait vraiment qu’il se calmerait une fois à l’intérieur. Il se dirigea ensuite vers la portière de mayuko, la refermant pour elle et lui faisant signe de le suivre, trainant ryuko avec lui, impatient d’arriver à la maison une bonne fois pour toute.

Son premier réflèxe fut de retirer la laisse du chien, la laissant tomber dans un coin de l’entrée et le laissant aller librement dans l’appartement, renifler un peu partout tandis que lui retirait ses chaussures, sa veste, puis se retournait vers mayuko. C’était irréel, de la voir, là, dans son appartement, alors qu’il ne l’avait plus vue depuis des mois, des années même. « c’est pas compliqué. salon, cuisine, ma chambre, puis la salle de bain au fond là-bas. tu dors ici ce soir j’imagine alors… » il haussa les épaules et lui fit signe de s’avancer, l’aidant à se débarrasser du superflu en chemin, la dirigeant vers sa chambre. Il pouvait bien tenter de lui trouver des vêtements dans ceux de mia, mais il doutait de l’humeur de cette dernière lorsqu’elle apprendrait qu’il avait fourré son nez dans ses vêtements. Ça, ce n’était jamais une bonne idée. « fouille, tu risques pas de trouver des trucs bizarres. » il lui pointa l’une de ses commodes, celle où il rangeait la plupart de ses vêtements.