NOCTURNE VULGAIRE (heejun)

respires, inspires.
petit à petit tu perds le fils,
petit à petit le film se ralentit devant tes yeux.
tout s'engourdit en toi, tout devient tellement plus beau.
l'extase, une bien douce sensation pour ta pauvre âme. pourtant, tu aurais souhaité que son corps perce davantage ta peau, ta chair, ton coeur, qu'il abîme le sombre abysse de ton être, qu'il prolonge cet instant divin, rêvant de t'éteindre auprès de lui. désormais, ce n'est plus qu'un lointain mirage.
un doux regret que tu effleures de tes lèvres encore brûlantes,
ardentes de plaisir,
fiévreuses d'avoir atteint le sommet de l'effervescence.
corps délicieusement abîmé,
yeux embués,
jambes vacillantes,
coeur tremblant,
ta peau qui frémit après avoir partagé dans une harmonie des plus sensuelle vos désirs audacieux,
il raisonne encore en toi retentissant éperdument dans tes veines, tel un poison, un enivrant venin.
« Oui… j’en suis parfaitement satisfaite. »
et ton âme nage encore — presque désespérément — dans le tumulte de vos derniers ébats car tu le sens, tu le sais,
le glas sonnera bientôt la fin.
alors tu profites,
tu t'accroches à ces derniers instants avant de retrouver ce terrible quotidien. tu l'observes, lui, seulement lui, au travers les bruits mélodieux de ses vigoureux râles d'un passion encore présente, au travers l'orchestre symphonique de l’eau qui coule comme la lave transparente sur les parois de verre où ton ton dos s'échoue nonchalamment,
la figure voilée et sombre de fatigue,
puissant ta puissance dans l'impuissance de tes mouvements.
« Hee Jun prends-moi dans tes bras et emmènes-moi dans notre lit. Je pense que j’ai atteint ma limite. »
voix tremblante,
esprit fatigué,
existence mouvementée,
corps épuisé par la passion qu'il vient de semer,
mais désirs satisfaits,
belle nymphe au sourire osé, aux yeux embrassés, au plaisir revigoré,
et ce, à tout jamais,
du moins, jusqu'à la prochaine sécheresse, jusqu'au prochain manque, jusqu'à la prochaine envie de lui.
à croire que tu ne peux plus t'en passer,
désormais, tu en es sûre, la luxure te colle à la peau et plus jamais tu ne pourrais te passer d'être foncièrement un être de débauche.
notamment en ce moment, seule, lovée contre ton torse encore chaud, entourée par ses muscles saillants attendant l'instant où il te déposera une seconde fois sur ces draps de soies,
lieu de lubricité,
lieu tant convoité par tes hanches souillées,
à la recherche de confort et de repos, rien qu'un instant, seulement un instant avant de quitter ce paradis, cette délicieuse illusion, votre éden.

plus que quelques heures, quelques minutes, quelques secondes.
derniers échanges,
derniers baisers,
dernières étreintes,
preuve d’une fin inévitable.
retour au chaos.
alors tu te laisses porter par l’ivresse de ses caresses qu’il dessine à coup d’amour et d’affection sur ton corps divin. mais tu désires plus, toujours plus. tu aimerais te complaire du peu qu’il t’offre, mais ce n’est pas assez, ce n’est jamais assez. toutes ses promesses, toutes ses caresses ne remplaceront jamais ce vide qui te ronge de l’intérieur.

｟un jour, il disparaîtra loin de moi.｠

simple pensée, mais tu sembles tétanisée, presque assommée, incapable de rien, car enfin tu comprends que ta vie n’est qu’une vulgaire chimère, un fantasme passager, que tu essaies, en aveugle, d’aviver.
triste océan qui berce ton âme.
« Oui… tu as raison ce n’est pas la dernière fois. » — du moins, tu l’espères, car tu te rends très vite compte que tes mots raisonnent comme un adieu.
« Hee Jun, serres-moi contre toi. »
furtif mouvement et tu le saisis du bout des doigts pour le ramener contre toi,
qu’il t’habille de ses bras chaleureux,
qu’il te couvre de ses lèvres et de baume,
car aujourd’hui tu as besoin de croire en quelque chose de profond, de solide, d’être porter par un espoir.
être à ses côtés, tout simplement.
seulement vous,
qu’il passe sa main dans tes cheveux,
qu’il prenne ta vie pour en faire quelque chose de mieux.
douce illusion, joli fim que tu te passes en continu, tu te revois dans la soirée chaude de tout à l’heure ;
car cette nuit à ses côtés c'était comme du lait, comme du coton qui t'a enveloppé de nulle part.
car cette nuit à ses côté c'était comme une lueur dans les profondeurs,
enfin, tu t'es senti reprendre des couleurs.
si tu l'avais pas vécu tu ne l'aurais pas cru.
alors tu t'accroches à lui fermement, comme une enfant à un rêve ou à un dernier espoir, allongée, clignant des yeux, laissant le temps filer,
à perdre tes derniers instants à embrasser ses joues, puis sa peau.
« Je vais devoir t'abandonner, il m’attend. Tu peux rester dormir ici si tu veux, j'ai déjà payé pour deux nuits. »
et c'est à contre-coeur que tu le quittes, que ton corps s'arrache de son étreinte pleine de vie, pour te parer d'un vêtement plus distingué.